Eckhart Tolle : « Tu es le ciel »

Vous êtes tous des praticiens avancés de la présence. Cela veut donc dire que vous n’attendez pas que je dise quelque chose d’important, parce que vous savez que ce qui est important se trouve déjà là et non pas dans l’instant d’après. Donc, la compréhension que ce qui est important, ce qui importe vraiment, se trouve déjà là et non pas dans l’instant d’après, veut dire que vous avez déjà basculé dans un état de conscience différent. C’est très simple : juste cette réalisation !

 

Mais l’illusion est si profondément enracinée – la croyance, la supposition inconsciente – que l’instant d’après importe plus que l’instant présent. Tout le monde hérite de ce schéma mental qui rend la vie très frustrante. Vous le savez tous. Elle est bien sûr frustrante, parce que l’instant d’après n’arrive jamais. Il ne peut pas arriver, parce que la vie n’est à jamais faite que de cet instant-ci.

 

Nous sommes donc ici pour aller plus profondément dans cet instant et non pas attendre du suivant quelque chose de plus significatif. Mais quand nous utilisons le langage, le futur s’immisce toujours d’une manière ou d’une autre et cela semble paradoxal. Dire que nous allons plus profondément dans cet instant semble impliquer le futur.

 

Nous nous sentons donc très bien à être ici, maintenant, et nous nous défaisons de l’illusion qu’il manquerait quelque chose d’important dans notre vie ou que ce ne serait pas juste que cela ne soit pas encore arrivé. Il y a l’illusion très profondément enracinée que quelque chose serait injuste, mais cela pourrait bien s’avérer juste, un jour. La personne qui se laisse encore illusionner par des choses matérielles croit qu’il sera juste que ceci ou cela lui arrive ou qu’elle parvienne à ceci ou à cela. De la même façon, le chercheur spirituel croit qu’il sera juste qu’il soit illuminé. Dans les deux cas, il s’agit de futur, la promesse de la chose.

 

Et si vous pensez que vous allez être illuminés ou éveillés, c’est bien sûr à nouveau frustrant, parce qu’après quelques années, vous constatez que ça n’est toujours pas arrivé. L’une des questions soumises récemment relevait que ça n’était toujours pas arrivé après dix ans ! Une autre personne me dit : « Je t’écoute sans arrêt depuis deux ans et il ne se passe toujours rien ! ». C’est l’illusion : la personne espère là que quelque chose lui arrive : un feu d’artifice peut-être, un feu d’artifice intérieur.

 

Et ce faisant, vous laissez continuellement échapper quelque chose de fondamental. C’est facile de le laisser échapper, parce que l’activité mentale est très attrayante et hypnotique. Prenons une analogie que j’ai pu déjà utiliser – je ne me rappelle pas. Pendant un moment, pensez à vous comme étant le ciel. Le ciel est constitué de nuages et également d’espace lumineux que l’observateur humain voit bleu quand la couverture nuageuse n’est pas complètement dense comme aujourd’hui. Il y a un mélange de nuages et de ciel lumineux. Aujourd’hui, par exemple, tout le ciel est nuageux, mais la luminosité brille toujours à travers les nuages.

 

Donc, imaginez-vous comme étant le ciel. La plupart des gens ne se connaissent qu’en tant que nuages et ils perdent complètement une dimension intérieure, plus profonde et beaucoup plus vaste qui, avec notre analogie, serait l’espace céleste, le ciel lui-même dans lequel les nuages apparaissent et disparaissent. Chaque humain a en lui cette dimension sans nuages, mais il est tellement conditionné, hypnotisé, qu’il accorde toute son attention aux seuls nuages, qu’il s’identifie aux nuages, se prend pour un nuage et prend les autres pour des nuages. C’est tout ce qu’il voit.

 

Vous suivez donc chaque nuage – dans l’analogie, les nuages sont les pensées qui émergent dans le mental ou les perceptions sensorielles. C’est un contenu du mental. Tout contenu mental serait un nuage. Tout contenu mental qui surgit vous attire et vous le suivez. C’est soit quelque chose de sensoriel, soit une pensée, soit une émotion qui se présente et qui est aussi du contenu. Le contenu qui survient vous attire et vous partez . . . Et donc, pour la plupart des gens, la vie consiste à… – Comme un chien qui suit une odeur. Il y a une odeur intéressante, fascinante . . .

 

J’observe mon chien. Notre chien a un flair très développé. Bon, tous les chiens ont un flair très développé, mais certains chiens aux grandes oreilles ont apparemment un flair encore plus développé. Quand ils trouvent quelque chose. ils sont complètement absorbés. Plus rien d’autre n’existe à ce moment-là. Il est attiré par l’odeur comme s’il était tiré par un fil . . et habituellement, à un certain moment, au bout de sa poursuite, le chien trouve quelque chose : un chewing-gum que quelqu’un a jeté ou une substance qu’on ne peut plus définir mais quoi qu’il en soit encore mangeable. Et je suis étonné parfois : après deux minutes, le chien trouve tout à coup d’où venait l’odeur et il . . . Ensuite, il attend la prochaine chose.

 

Et donc, le mental humain est très similaire. Il est attiré par tout contenu qui surgit, par chaque nuage, pour continuer avec cette analogie. La plupart des humains vivent de cette façon, complètement dominés et complètement identifiés à n’importe quel contenu qui se présente dans leur mental. Il s’agit de l’existence humaine normale, identifiée à… – Un autre mot pour le contenu pourrait être la forme – identifiée à chaque forme qui se présente. Et c’est frustrant, parce que le contenu est éphémère. Il a tendance à se dissoudre assez rapidement.

 

Quand le chien a trouvé l’origine d’une odeur, il attend autre chose. Et l’humain se comporte de la même façon. Quand il s’est identifié avec un contenu particulier qui se présente . . . après quelques minutes, heures, jours, parfois semaines, quoi d’autre ? Ce n’est plus aussi satisfaisant, parce que le contenu n’est jamais aussi satisfaisant que ça. Il faut toujours autre chose. Donc, la recherche continue, que ce soit une recherche matérialiste d’autre chose à acquérir ou la quête spirituelle d’un état céleste projeté à incarner.

 

Et même si vous avez assez de chance pour vivre un feu d’artifice dans le monde intérieur, ça se calme après un temps, parce que vous ne pouvez pas avoir de feux d’artifice en continu. Tout ce qui dure finit par devenir ennuyeux, parce que même le feu d’artifice… – après deux semaines d’extase… – je ne parle pas d’ecstasy – Après deux semaines d’extase, vous êtes là . . . « C’est trop, je n’en peux plus ! ».

 

Et donc, dans cette recherche de plus de contenu, qui implique bien entendu le futur, parce que vous espérez bien que le contenu supplémentaire se manifestera à l’avenir, quelque chose est continuellement négligé. À la recherche de nouvelles formations de nuages, pour en revenir un moment à notre analogie, à la recherche de nouvelles formations de nuages, d’un autre nuage fascinant… – j’aime les nuages, c’est agréable de les regarder et j’aime des choses également, comme vous, j’en suis sûr !

 

Nous ne disons pas qu’il faut rejeter complètement tout ce qui se présente sur le plan de la forme comme l’ont fait certaines traditions spirituelles extrémistes. Il y a même eu certaines croyances, des systèmes de croyances propagés par exemples par des écoles gnostiques où il était dit que toute chose matérielle était mauvaise. On n’a pas besoin d’aller jusque-là.

 

Apprécier les nuages, oui ! J’aime regarder les nuages et j’aime parfois des choses, avoir de belles choses. On n’a pas nécessairement besoin de les acquérir. On peut regarder une chose dans la vitrine d’un magasin et dire : « Oh, que c’est joli ! ». Est-ce que je veux entrer et l’acheter ? Peut-être que oui, peut-être que non ! Ce n’est pas nécessaire. Pour un instant, vous l’appréciez et puis c’est tout ! Parce que si vous l’achetez, vous pouvez bien sûr vous identifier avec la chose un certain temps jusqu’à ce qu’elle ne vous satisfasse plus et vous voulez autre chose.

 

Donc, je ne dis pas de ne rien acheter, ni rien de ce genre. Appréciez le monde des formes, mais ne négligez pas ce qui est plus profond, plus fondamental, plus essentiel dans votre vie, ce qui est l’espace. Pour rementionner brièvement notre analogie, à la recherche des nuages, n’oubliez pas ce qui est au-delà des nuages, ce qui permet même aux nuages d’exister, l’immense espace lumineux du ciel et il y a un équivalant intérieur de cela en soi et c’est toujours là. Et plus vous attendez le prochain contenu, plus vous passez à côté de l’immense espace qui est déjà là. Il est toujours là maintenant.

 

Mais il ne peut pas être trouvé comme si vous découvriez tout à coup quelque chose et disiez : « Ah, c’est là ! Maintenant, j’ai obtenu cet immense espace. Le voici. ». Vous ne pouvez jamais le trouver de la façon que vous trouveriez un objet, ni de la façon que vous trouveriez tout contenu mental. Cela n’est pas quelque chose qui se trouve être l’objet de votre attention ou de votre conscience. Tout autre chose est un objet dans votre conscience, un contenu, une forme, mais ce que nous appelons l’immense espace intérieur – c’est juste une façon de dire les choses – n’est jamais un objet, parce que c’est la conscience elle-même.

 

Vous ne pouvez pas regarder dans sa direction pour la trouver, parce que le regard est déjà cela. La chose que vous espérez, que vous « regardez », laquelle n’est pas une chose, est déjà dans la conscience qui regarde. En fait, pour le dire d’une façon différente, ce que vous recherchiez, c’est très essentiellement qui ou ce que vous êtes. Parce que qui êtes-vous ou qu’est-ce que vous êtes en essence ? Vous n’êtes pas le nom, votre nom ou votre histoire personnelle, mais quelque chose de plus essentiel, un sentiment plus profond de l’état d’être ou de « je ». Qu’est-ce que c’est ?

 

Si vous regardez attentivement, mais ne regardez pas comme s’il s’agissait d’un objet – regardez à l’intérieur et réalisez qu’il y a une lumière en vous, non pas une lumière visuelle, mais une présence qui est essentiellement qui vous êtes et qui n’a rien à voir avec votre passé, ni votre futur. Nous sommes ici pour nous habituer à être cette présence de façon consciente.

 

Si c’est pour vous bon et juste d’être ici en cet instant, d’entendre tout cela et pratiquement, disons d’en reconnaître la vérité, ça veut dire que vous y êtes et vous ne pouvez pas dire « où ». Il n’y a pas d’endroit. Si être ici vous irrite ou vous ennuie, cela veut dire que vous n’avez pas encore pu sortir du contenu, de votre mental, de la pensée, de toute chose avec quoi vous vous identifiez. Mais si vous avez simplement un sentiment de bonté qui surgit du seul fait d’être ici, cela veut dire que cette dimension qui n’a pas de forme se manifeste déjà, le ciel, le ciel spacieux.

 

Nous sommes ici pour trouver – ou pour réaliser que c’est déjà là – le ciel spacieux à l’intérieur. Et c’est probablement ce dont Jésus parlait puisqu’il utilisait le mot « ciel » qui, dans beaucoup de langues, est le même mot que pour le ciel, non pas en anglais, mais dans la plupart des autres langues. « Sky » et « Heaven » : « cielo », « Himmel », ciel ont les deux acceptions. Je ne sais pas ce qu’il en est pour la langue araméenne natale de Jésus, s’il y a un même mot qui signifie à la fois le ciel et le paradis. Et il y a bien sûr la traduction grecque. Je ne sais pas non plus s’il y a aussi un mot avec les deux acceptions dans cette langue.

 

Mais peut-être Jésus parlait-il lui aussi du ciel. Le « royaume des cieux » en parle. Bon, « royaume » est une ancienne expression. Je n’utilise pas le mot « royaume », parce que cette sorte de choses ne fait plus partie de la réalité de la plupart des gens. Le domaine céleste : au lieu de royaume, parlons de domaine ou de dimension. Nous remplaçons donc « royaume » par « dimension » et pour « paradis », nous utilisons l’analogie du ciel qui est un espace immense.

 

Quant au Royaume des cieux, on en fait des lectures dans les églises tous les dimanches et personne ne sait de quoi l’on parle. Le prêtre ne sait pas ce qu’est le royaume des cieux. Il peut y avoir des exceptions, bien sûr, mais la plupart sont identifiés avec le contenu. Ils ne savent pas ce qu’est le royaume, parce que ça n’est pas du contenu. Ils le lisent tous les jours, ils y croient, vous y croyez, au royaume des cieux ! Ce qui était censé n’être qu’un indicateur d’une réalisation intérieure est devenu un autre objet dans le mental avec lequel vous vous identifiez et vous croyez, juste à une chose de plus. Pour une personne, c’est le royaume des cieux. Pour une autre, c’est une doctrine politique ou n’importe quoi d’autre, à nouveau du contenu mental.

 

« Je crois en ceci. Tu crois en cela. Tu ne crois pas en quoi je crois, tu es donc mon ennemi ». Cette sorte de folie est manifestée quand les êtres humains sont complètement englués dans du contenu mental. Il parlait donc de la dimension du sans-forme à l’intérieur et il disait que le Royaume des Cieux ne viendra pas avec des signes observables. Vous ne pouvez pas dire : « Ah, c’est ici ! » ou « Regarde, c’est là-bas ! ». C’est ce qu’on trouve littéralement dans le Nouveau-Testament. C’est plus ou moins littéral, je paraphrase un peu. Vous ne pouvez pas dire : « Regarde, c’est ici, c’est là ! ». « Mais en vérité, je vous le dis, le Royaume des Cieux » – la dimension de l’espace – « est en vous ». C’est en vous et c’est à l’extérieur. Et c’est essentiellement qui vous êtes.

 

Et bien sûr, vous commencez à comprendre qu’en vous, il n’y a pas qu’une succession de pensées, ce qui est la seule réalité pour la plupart des gens, mais qu’il y a là également un espace entre les pensées et derrière les pensées. Et cet espace est là quand vous réalisez que parfois vous ne pensez pas. Vous n’avez même pas besoin d’essayer. Quiconque se sent attiré là – peut-être attiré pour des raisons tout à fait mauvaises pour une ou deux exceptions – mais quiconque se sent attiré là a au moins eu des aperçus – dans certains cas plus que cela – des aperçus de cette réalité à l’intérieur qui n’est pas la pensée, qui est simplement la conscience spacieuse.

 

La seule raison pour laquelle nous sommes ici, c’est pour être consciemment cette conscience spacieuse et comprendre que cela vous libère du fait d’être bloqué pour le reste de votre vie dans cette absurdité banale et ennuyeuse – même si ça a l’air spectaculaire et . . mélodramatique – d’être bloqué dans cette absurdité banale de l’existence quotidienne et des préoccupations complètement personnelles ou même des préoccupations collectives avec lesquelles vous êtes identifiés et qui peuvent même être plus folles encore que les préoccupations personnelles. Cela vous épargne de passer le reste de votre vie dans cette prison terrible de votre mental.

 

Et cette prison devient de plus en plus étroite dans votre vie. Et en vieillissant, quand vous êtes devenus vieux… – Il y a un potentiel magnifique à réaliser de plus en plus que vous n’êtes pas le contenu de votre mental, de plus en plus d’espace s’ouvre alors que vous vieillissez, mais malheureusement, pour beaucoup de gens, c’est le contraire qui est vrai. Ils deviennent de plus en plus étroits. Tous vos schémas mentaux sont de plus en plus rigides. Vous devenez alors ce vieillard grincheux . . . qui dit catégoriquement ce qu’il pense de tout. Mentionnez la moindre chose et il vous dira péremptoirement ce qu’il en est : « C’est comme ça ! Je peux te dire ce qu’il en est. Je connais le monde ! ».

 

Vous pouvez donc voir quelle prison c’est ! Vous avez froid ? On peut peut-être mettre un peu plus de chauffage. Il est donc question d’une grande libération ! C’est en fait la libération – encouragée disons de Jésus au Bouddha – c’est la libération du soi dont le Bouddha disait « c’est une illusion ». Finalement, il n’existe même pas. Il parlait donc de l’identification complète au contenu et de l’ignorance totale de la dimension plus profonde de qui vous êtes que lui n’appelait pas « le Royaume des Cieux », qu’il appelait simplement « le vide ».

 

Et à nouveau, pour les spécialistes du bouddhisme et même pour certains moines, le vide reste un concept : « Je recherche le vide. J’espère trouver un jour ce vide dont le Bouddha a parlé. Il me faudra peut-être encore quatre ou cinq incarnations, mais cela n’est rien. Et je parviendrai au vide ».

 

Une fois de plus, vous pouvez voir combien il est facile de mal interpréter ces merveilleux enseignements, parce que nous leur appliquons nos vieux schémas mentaux. Ils sont ainsi intégrés aux vieux états d’esprit. Le Bouddha indique donc également que ce que vous prenez comme étant vous-même n’est pas vous-même en réalité. Ce sont seulement des formations qui surviennent, des formations passagères qui surviennent, de la même façon qu’un nuage est une formation passagère. Un nuage est bien sûr beaucoup plus passager et fugace que la forme humaine, mais la forme humaine est assez fugace également.

 

Si vous pouviez voir une version accélérée d’une vie humaine, à la manière qu’on a présenté le film de la version accélérée d’une fleur Où l’on voit la plante sortir du sol… – C’est une chose étonnante à voir : la plante qui sort, les bourgeons qui arrivent et qui s’ouvrent, puis il y a une fleur, mais non pas pour longtemps ; et ensuite elle se ratatine, se désagrège et retourne au néant.

 

Et vous observeriez la même chose si vous voyiez une version accélérée du développement de votre corps. Il grandit . . ., atteint la maturité ; pendant un temps, il y a cet équilibre; ensuite, la première ride apparaît, puis d’autres encore, puis d’autres choses qui ne devraient pas être là et si vous êtes suffisamment riches, vient le temps du lifting, mais vous ne pouvez pas arrêter le cours des choses et, finalement, le corps se décompose. Donc, cette forme humaine n’est pas non plus en réalité… – Il déambule pendant quelques années ; il mange, boit, fait l’amour, regarde des films et s’embarque dans des drames : « Oh, ce qu’il a fait, ce qu’elle a fait ! ». Et les personnes incriminées ont bientôt disparu !

 

Et c’était également très important, semblait très important dans le moment. Les affaires humaines, quelle lourdeur ! C’est la prison. Un espace arrive dans votre vie. Bien entendu, des choses continuent à se produire dans votre vie quotidienne. Des défis continuent de se présenter. Des choses ne tournent pas rond, comme dirait le mental très souvent. Des choses arrivent, vous perdez quelque chose ou quelque chose vous est enlevé ; quelque chose arrive qu’on ne voulait pas en réalité… Ces choses continuent de se produire, c’est OK, mais sur un arrière-plan spacieux. Et vous n’êtes pas complètement pris par chaque pensée qui émerge, ni identifiés avec chaque pensée qui émerge, et vous êtes de plus en plus conscients de l’espace pendant que les drames continuent dans une certaine mesure de se produire autour de vous.

 

C’est en fait ce que signifie le terme spirituel « détachement » qui est en vogue depuis un moment. Dans certaines traditions spirituelles, on vous dit qu’il faut que vous soyez détachés des choses du monde. Les praticiens spirituels ont essayé de le faire en se détachant physiquement de leur environnement ordinaire, d’être des renonçants. Bien entendu, cela en soi ne veut pas dire que vous vous êtes réellement détachés. Cela peut marcher, mais dans beaucoup de cas, ça ne marche pas. Le véritable détachement est une non-identification intérieure à la forme, une non-identification surtout aux formations mentales qui émergent continuellement. Elles arrivent et de plus en plus, vous êtes la conscience dans laquelle elles se présentent. Vous l’êtes déjà.

 

Vous êtes la conscience, l’espace, le ciel, le ciel immense, et il y a les nuages, et il y a les drames. Mais ce qui se passe, quand vous êtes conscients, quand il y a en vous la dimension de la conscience, c’est que vous n’alimentez plus le drame humain. Vous pouvez encore y être confrontés, parce que c’est ce que créent les humains, mais vous ne l’alimentez plus, vous n’y contribuez plus. La réaction envers les gens n’est plus là, envers ce qu’ils ont fait. Un certain changement se produit encore dans le domaine de la forme quand a lieu le changement intérieur qui fait lâcher l’identification à la forme, au mental, pour être la conscience. Cela affecte même le monde de la forme.

 

Le monde de la forme ne sera jamais absolument satisfaisant. Il n’est même pas censé l’être. Il est seulement censé vous éveiller. Dans une certaine mesure, on peut même dire que le monde de la forme est censé vous frustrer, en vue de vous éveiller. Et une fois que vous êtes éveillés, le monde de la forme est en fait un endroit tout à fait agréable, parce que vous n’en avez plus besoin pour votre identité, ni pour votre épanouissement. Vous pouvez alors apprécier les choses, incluant les soi-disant imperfections des circonstances et des gens.

 

Pour chaque être humain que vous rencontrez, pour chaque situation à laquelle vous êtes confrontés, vous remarquez tôt ou tard – en général assez vite – qu’il y a un défaut. Il y a un défaut dans la situation qui était supposée être sensationnelle. Pourquoi cela devait-il arriver ? « Et cette merveilleuse personne que j’ai rencontrée ! » Dès que vous commencez, au plus tard quand vous commencez à vivre avec elle, vous découvrez le défaut et parfois bien plus qu’un. Et c’est pareil pour chaque endroit où vous allez qui était supposé être idéal ! Même Milvalley a des défauts. Et quand vous n’avez que la forme, les défauts sont frustrants. « Ça ne devrait pas arriver ! Et cette personne ne devrait pas se comporter comme elle le fait ! Écoute, je ne pensais pas qu’elle était comme ça ! Ça n’est pas la personne que j’ai épousée ! » Et pourtant si !

 

C’est une chose intéressante que le défaut qui se présente en quoi que ce soit : les endroits, les situations, les gens, les conditions, peu importe ! « Oh ! » Regardez-le simplement : « Ah, le voici ! ». N’exigez pas qu’une situation, un endroit, une condition ou une personne vous rende heureux, vous épanouisse et vous donne complète satisfaction. Et vous l’exigerez tant qu’il n’y aura en vous que du contenu. Vous êtes à la recherche du meilleur contenu que vous pouvez trouver et auquel vous allez vous identifier. Quand vous ne l’exigez plus, même le défaut devient quelque chose qui n’est plus un problème en fait. Vous pouvez vivre avec les défauts.

 

Certes, si le défaut est excessif, vous pouvez vous en aller. Si le défaut de votre conjoint revient à vous battre une fois par mois, parce qu’il boit, ce n’est pas un défaut que vous pouvez choisir de vivre. Dans ce cas, vous vous en allez. Mais pour d’autres défauts qui se présentent, de nombreux… – Peu importe avec qui vous vivez, il y aura des défauts. Et vous commencez à être spacieux à mesure que vous acceptez les soi-disant imperfections dans le monde de la forme, des conditions, des endroits, des gens. Vous trouvez la paix et vous n’exigez pas quelque chose que le monde de la forme ne peut pas vous donner. Et tout devient alors satisfaisant. Vous appréciez vraiment les gens, les choses, et vous ne retenez pas les défauts contre eux.

 

La grosse faute que fait une personne qui n’est pas encore libre… – Admettons qu’il y ait un défaut. Les gens font souvent des erreurs. On donne tellement d’attention au défaut d’autrui que c’est tout ce que l’on voit. Et l’on s’en plaint alors : « Voilà comment il est ! Voilà comment elle est ! ». On ne réalise pas qu’il ne s’agit que d’un défaut dans l’ensemble de l’être de la personne. Et bien sûr, si vous vous concentrez sur le défaut, vous lui donnez en fait de plus en plus d’énergie et vous le grossissez chez la personne. À moins qu’elle ne soit vraiment présente, vous amplifiez réellement son défaut.

 

Par exemple dans les anciens enseignements, c’est ce qu’on appelle « juger autrui », « le jugement porté sur autrui ». Ainsi, vous grossissez la chose et vous rendez la personne encore plus inconsciente qu’elle n’était avant. Et vous-mêmes, vous devenez de plus en plus inconscients. C’est la réaction, c’est plus de contenu qui arrive. Vous vous identifiez à votre réaction. Ce que vous pensez qu’est l’autre n’est pas la réalité. En essence, chaque humain est l’espace à l’intérieur. De l’espace en vous vous permet de contacter ou de sentir l’espace en l’autre au-delà du contenu de son mental. Et c’est une chose extraordinaire !

 

En réalité, vous pouvez alors… – C’est la façon… – Voyons le mot « métabonté » ou un ancien mot « bienveillance ». Confucius parlait de bienveillance qui est une qualité de l’être humain, la « bonne volonté », bienveillance, la bonté dont parle le Dalaï-lama. Le Dalaï-lama ne dit pas : « Ma religion est le bouddhisme ». Il dit : « Ma religion est la bonté ». Donc, c’est une qualité en l’être humain, seulement potentielle en beaucoup d’humains, qui résulte en réalité de la non-identification au mental. Elle émerge de cet espace. Vous avez alors de la bienveillance envers les autres êtres humains.

 

« Bienveillance » est bien sûr un mot d’origine latine. « Bien » vient de « bene » qui veut dire bon et « veillance » de « veuillant » qui veut dire vouloir. Il s’agit donc de « bonne volonté » envers autrui. Dans le Nouveau-Testament, c’est appelé « amour », « agapê » en grec. Ce n’est pas l’amour de l’ego, mais l’amour qui est bienveillance, bonne volonté. Et cela provient seulement de cet espace et non pas de la pensée. Vous ne pouvez pas vous penser comme étant un humain bienveillant, ni vous escrimer à pratiquer la bonté : « J’essaie d’être aimable et gentil, mais ce n’est pas facile, parce que ces gens me provoquent tout le temps ».

 

Et cela change vraiment le monde quand la bonté survient entre les êtres humains. Cela affecte le collectif, la façon dont interagissent les entités collectives, telles que les nations.

 

Cela doit commencer avec l’individu. Cette qualité émerge en l’individu. Et dans la bonté, vous ne retenez pas le défaut contre la personne. Vous pouvez peut-être voir l’inconscience en l’autre personne. Ce n’est pas ce qu’elle est. Vous n’avez donc pas besoin de réagir comme si c’était son identité. Ce n’est pas son identité, c’est ce dont elle a hérité dans le cours de l’évolution humaine ; c’est l’inconscience dont nous héritons tous.

 

L’espace, l’intervalle entre deux pensées. Par exemple, maintenant. Vous n’avez pas besoin de vous asseoir dans une position particulière pour être spacieux : « Je ne peux être spacieux que quand je peux m’asseoir dans la posture du lotus. J’ai besoin ensuite de m’abstraire. ». « Ne faites pas de bruit, s’il vous plaît, je vais être spacieux maintenant. . . . Être spacieux, c’est une affaire très sérieuse ! . . . J’améliore de plus en plus mon aptitude à être spacieux. Je suis plus spacieux que vous ».

 

Au lieu de vouloir le provoquer, réalisez que c’est déjà là. . . Bien sûr, cela n’alimente plus beaucoup l’ego, parce qu’il n’y a alors rien à atteindre, si c’est déjà là ! L’ego n’a donc plus rien à faire. Il dit : « Je veux PARVENIR à l’espace, au royaume des cieux, l’illumination ». Il peut même dire pire : « J’y suis parvenu ».

 

C’est donc magnifique que vous puissiez tous réaliser maintenant dans votre propre vie – la plupart d’entre vous le font – qu’il n’y a aucun besoin de vous laisser embarquer dans des pensées continuelles et que, naturellement, l’état de conscience émerge en vous. Simplement, regardez ! On peut d’ailleurs également l’appeler le calme, le silence. Cela se trouve déjà à l’arrière-plan de vos pensées et entre deux pensées, par exemple maintenant. . . . Et cela ressemble à une sorte de néant. Cela n’est donc pas intéressant, du point de vue mental, et au début, il semble qu’il y ait une absence de toute chose, mais ce n’est pas cela. Il y a là une présence. Il y a une absence de choses, il y a une absence de contenu, mais il y a une présence à laquelle vous ne pouvez donner aucun nom et c’est qui vous êtes. C’est ce que Jésus appelait la lumière du monde en ajoutant que c’est ce que vous êtes.

 

Sentir cette présence intrinsèque, qui est la lumière du monde, c’est la libération du soi, comme le disait le Bouddha ; c’est le salut, comme le disait Jésus ; c’est la libération, comme le disent certains enseignements indiens.

 

Donc, ce qui apparaît au début comme une absence totale est seulement l’absence de la forme et cela devient la fondation – cela l’a toujours été – du sentiment de qui vous êtes. La présence que vous êtes devient la fondation du sentiment de qui vous êtes et c’est ce que le Bouddha appelait le non-soi. Et quand c’est la fondation de qui vous êtes, vous n’avez pas besoin de défendre, ni d’essayer continuellement de renforcer l’identité en tant que forme de qui vous pensez être, l’histoire avec laquelle vous êtes identifiés dans votre mental, parce que vous réalisez que ça n’est pas qui vous êtes. Et cela devient une chose amusante. Vous développez une relation amusante avec votre identité en tant que forme qui inclut votre histoire, toutes les choses, toutes les pensées qui émergent dans votre mental et toutes les émotions à n’importe quel moment. Vous avez une relation plus amusante avec vous-même en tant que forme temporaire, la forme physique et mentale, parce que vous réalisez que le vous essentiel est la présence sans forme.

 

Dès lors, quand quelqu’un vous critique, critique ce que vous êtes au niveau de la forme, ce n’est plus aussi menaçant. Et vous ne recherchez pas désespérément quelque reconnaissance des autres gens pour entendre dire que vous êtes suffisamment bons, parce que vous sentez ou réalisez déjà la bonté intrinsèque qui n’a rien à voir avec vous en tant que la forme physique et mentale. C’est ce que les gens recherchent, un sentiment de dignité, la confiance en soi. Autrement, il vous faut chercher à vous convaincre vous-même ou les autres que vous êtes suffisamment bons : « Oui, je suis vraiment mieux que cette personne et je ne dois donc pas me plaindre. Je présente mieux que cette personne. Je suis plus cultivé que cette personne. Je suis mieux habillé que cette personne. Quoi que ce soit, cette personne est bien pire que moi, je n’ai pas à me plaindre ! Je suis vraiment très bien comparé à ces gens ».

 

Vous n’avez plus besoin des comparaisons. Elles ne sont que compensation. Et vous pouvez voir à quel point c’est irréel, dépendre de ce que les autres pensent de vous, dépendre de ce que le monde pense de vous pour votre sentiment de dignité, de soi. Et si vous n’avez pas la reconnaissance, vous vous sentez indignes. Et de qui attendez-vous la reconnaissance ? Des gens qui sont endormis ! Vous attendez donc que le monde endormi vous reconnaisse. Et si le monde non éveillé vous reconnaît effectivement, pour une raison ou pour une autre, si vous devenez alors célèbres, cela devient également un grand défi. Vous pouvez lire la presse people, les magazines qui parlent de la vie des célébrités. Donc, manifestement, ça ne marche pas. Et ce qui fait partie de la libération, c’est que vous n’avez plus besoin de cette sorte d’identité.

 

Donc, cela n’importe pas vraiment si, à un moment donné, vous apparaissez relativement insignifiant à partir de votre identité en tant que forme, si vous n’êtes pas un VIP. Si l’année suivante, grâce à ce que vous avez fait ou ce que des gens pensent que vous avez fait, ou parce que vous avez participé à des émissions de téléréalité ou n’importe quoi d’autre, vous devenez soudainement un VIP, ça n’importe plus non plus en fait. Vous pouvez devenir célèbres pour quelques semaines ou quelques mois. On utilise même l’expression « célèbre pour un jour ».

 

Vous devenez donc célèbres pour un temps et le monde vous oublie à nouveau. Vous êtes alors terrassés. Ou vous êtes un acteur ou une actrice, vous êtes devenus trop vieux, on ne vous propose plus de rôles et vous êtes assis dans votre grande maison en train de regarder vos anciens films . . . et en buvant : « C’était moi. Tout est fini maintenant. Le monde ne me veut plus ». C’est très douloureux. Ou vous êtes un grand pianiste et vous faites soudainement de l’arthrite. Tout votre sentiment d’identité, envolé ! Mais c’était une illusion. Bien sûr, si vous avez une aptitude étonnante, c’est magnifique. Vous pouvez l’apprécier. Si vous êtes un grand pianiste, c’est merveilleux, mais ce n’est pas qui vous êtes au fond. C’est une chose temporaire. Vous êtes bon et vous pouvez l’apprécier, ce n’est pas votre identité. Si vous pensez que c’est votre identité, vous êtes prêts pour la souffrance.

 

Ce qui est excellent, c’est sentir votre présence intrinsèque en tant que qui vous êtes et non pas votre histoire, ce que vous avez, ce que vous possédez, non pas ce que vous savez, ni ce que vous pouvez faire. Ces choses ne sont pas qui vous êtes, ce que vous possédez, ce que vous savez dans votre mental, les aptitudes, ce que vous pouvez faire. Tout cela est excellent : vous pouvez apprécier ce que vous possédez ; vous pouvez apprécier votre connaissance ; vous pouvez apprécier vos aptitudes et en profiter, mais ce n’est pas qui vous êtes et vous pouvez ne pas les avoir pour toujours. Vous pouvez avoir des possessions, de gros investissements, mais qui sait ? Le prochain Madoff est au coin de la rue !

 

Donc, du plaisir à cela et il y a là de la paix. Toutes les choses que je croyais si importantes, parce qu’elles étaient rattachées à mon sentiment de soi, ne sont pas en fait aussi importantes que ça. Je dis parfois qu’elles sont relativement importantes, mais non pas absolument importantes. Votre état de santé est relativement important. Je préfère être en bonne santé que malade. C’est vrai, mais ce n’est pas d’une importance absolue. Il en va de même pour vos finances, vos relations, votre situation existentielle ou votre situation professionnelle. Tout cela est relativement important dans le sens où oui, je préfère avoir un travail sympa plutôt que d’être sans emploi, peut-être. Qui sait ? Être sans emploi est peut-être mieux.

 

Ces choses sont relativement importantes. Vous pouvez leur accorder un peu d’attention. Les choses du monde requièrent un peu d’attention, oui, mais il y a quelque chose qui est d’une importance absolue. Et c’est réaliser votre identité essentielle en tant que présence, non pas en tant que quelque chose, ceci ou cela. Tout le reste trouve alors sa juste place, le reste de votre vie, avec ses hauts et ses bas, gains et pertes, mais tout se met en place. Cela n’est plus absolument important. Quand ce qui est relatif apparaît comme absolu, vous ne tardez pas à souffrir. Vous ne réalisez pas alors ce qui est relatif et ce qui est absolu. Ils se confondent.

 

Vous pouvez trouver le même enseignement dans le Nouveau-Testament si vous vous en tenez à l’enseignement oriental : « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et tout le reste vous sera donné par surcroît ». Et je viens de dire la même chose. J’ai dit : le reste de votre vie trouvera sa juste place. « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu » veut dire « réalisez ce qui est absolument important » et le reste sera excellent.

 

C’est donc pourquoi nous sommes ici. La beauté en est la réalisation de soi. Une autre façon de le dire, vous-même en tant que présence sans forme et non pas un soi historique . . . Y être enraciné apporte une réelle paix intérieure et un sentiment de vie avec la paix. Et, comme je l’ai dit tout à l’heure, la bonne volonté, la bonté et une aptitude à permettre aux soi-disant imperfections de ce monde et des autres humains d’être telles qu’elles sont. Donc, l’espace est là derrière les pensées, entre les pensées. Il survient quand vous êtes dans le moment présent. Le moment présent est en fait l’ouverture qui accède à l’espace.

 

Je dis parfois, pour trouver cette dimension de la conscience spacieuse, soyez simplement amicaux avec le moment présent. Permettez à ce moment d’être comme il est. Vous devenez alors spacieux pour lui. Quand vous réagissez contre le moment présent, davantage de nuages apparaissent. La réaction contre un nuage est un autre nuage. Mais quand vous permettez au nuage d’être comme il est, . . . vous réalisez que vous êtes en réalité le ciel spacieux, parce que le ciel spacieux permet à la formation d’être là.

 

Donc, quoi qu’il arrive dans le moment présent, si vous le permettez, puisque c’est déjà comme c’est… – Vous ne pouvez pas discuter ça. Vous ne pouvez pas discuter ce qui est. C’est de la folie. C’est, c’est déjà le cas, c’est ! Vous réalisez cela et vous devenez l’espace pour ce qui est, vous devenez le ciel. À nouveau – je le redis, parce que c’est tellement important – quand vous réagissez contre, vous avez un autre gros nuage.

 

Disons qu’un gros nuage vient à vous, sous une forme ou une autre, un humain inconscient qui vous défie, une perte dans votre vie (votre travail, un investissement), quelque chose qui arrive à votre corps, un proche confronté à la souffrance ou tout autre chose, eh bien, c’est ce qui est ; l’espace émerge alors. Et de cet espace s’écoule la bonne volonté et de cet espace également surgit l’action juste quand une action est nécessaire. À nouveau, cette action juste n’est pas conditionnée par votre mental. Ce n’est pas l’action qui provient du conditionnement, laquelle n’est toujours que réaction, mais c’est un savoir ou ce que c’est émerge souvent sans un processus de prise de décision.

 

Quand vous êtes calmes, présents, et que vous examinez, regardez une situation, ce fait de regarder est simplement de la conscience. La lumière de la conscience immerge toute la situation. Vous regardez et vous savez alors ce qu’est l’action juste ou ce que sont les mots justes s’il est nécessaire que vous fassiez quelque chose, disiez quelque chose. Cela vient spontanément et vous le remarquerez, très souvent, sans un processus conceptuel de prise de décision.

 

D’autres fois, il peut arriver que vous ayez à utiliser votre mental pour décider ce qui est à faire. Vous devenez calme, vous réfléchissez à la situation : « Quelle est la véritable situation ici ? Qu’est-ce que j’ai à faire ? Qu’est-ce que je peux faire ? Quelle action puis-je engager ? ». Et vous retrouvez le silence. Et habituellement, tôt ou tard, en général assez vite, vous savez ce qui est juste. Vous ne résidez plus obsessionnellement dans les soi-disant problèmes.

 

De plus en plus, vous allez dans la présence, là où se trouve la solution. Elle n’est pas dans la préoccupation. Personne n’a jamais trouvé la solution à un problème en s’en inquiétant, en se faisant du souci. La préoccupation elle-même est un plus gros problème dans la plupart des cas que ce qui vous préoccupe et elle est plus nocive pour l’organisme, plus nocive en fonction de l’énergie que vous dégagez.

 

C’est une chose étonnante : beaucoup de choses qui préoccupent les gens n’arrivent en fait jamais. « Les choses pourraient aller mal ! Qu’est-ce qui va m’arriver si je perds mon emploi ? Il faut que j’y réfléchisse ! Oh, c’est horrible, je vais être sans ressources ! ». Vous voilà déjà sans ressources, dans votre tête ! Et si vous deviez vraiment être sans ressources en demeurant présents, cela ne serait pas aussi grave que ça. C’est comme une personne qui s’empêche de dormir chaque nuit en se tracassant à l’idée de se retrouver sans ressources.

 

J’ai fait l’expérience d’une période dans ma vie Où je n’avais pas de logement. Ce n’était pas si terrible. J’aurais préféré avoir une maison, c’est vrai, mais c’était ce qui est. On peut être avec ça. De temps en temps, je vois des SDF qui sont en fait plus présents que des gens qui ont de grands hôtels particuliers. Ce n’est pas systématique, le contraire peut arriver également. Il n’est pas garanti que le SDF soit plus évolué que la personne dans un grand hôtel particulier, ni que la personne de l’hôtel particulier soit plus évoluée que le SDF. Cela n’a rien à voir avec ça. Si vous êtes SDF, voyez comment vous pouvez passer à l’action. Vous pouvez avoir envie en premier lieu de vous en aller sous un climat plus chaud. Si j’étais SDF, je préférerais l’être sous un climat plus chaud que celui du Dakota du Nord.

 

Dans votre vie quotidienne, vous cherchez à voir : « Où est l’espace ici ? ». Et en prêtant attention, vous vous rendez compte : « Ah, c’est déjà là ! ». La quête de l’espace est déjà l’espace. Quand vous dites « où est l’espace », que se passe-t-il à cet instant ? À cet instant, il y a un sentiment de conscience, d’attention, de présence. « Où est-ce ? Je recherche l’espace maintenant. Oh, c’est déjà l’espace, la recherche est l’espace ! ». Donc, si vous ne réalisez pas cela, vous continuez de chercher : « Je suis à la recherche de l’espace ». La recherche… L’attention, la conscience qui demeure dans la recherche est l’espace. « oh !… Oh, j’y suis, ouah ! ». C’est incroyable, n’est-ce pas ? Donc, dès lors que vous le cherchez, vous l’avez. C’est incroyable !

 

C’est vraiment quelque chose qui m’étonne. Et c’est si simple. On pourrait dire que c’est un petit secret. Je devrais peut-être écrire un nouveau livre intitulé « Le secret n° 2″. cela devrait être « Le secret n° 1″, je suppose. Il y a les secrets, mais ils viennent après. Le secret n° 1, c’est réaliser… – Une autre façon de dire les choses, c’est : « Vous êtes ce que vous recherchez » . . . . J’y suis ! Ça ne peut pas être aussi facile, n’est-ce pas ? Bien sûr, vous l’avez maintenant, mais quand le monde vous menace, quand il revient et quand les nuages s’amoncèlent, le défi consiste à reconnaître encore l’espace tandis que les choses se déroulent autour de vous, à réaliser qui vous êtes même en plein théâtre du monde. La pratique spirituelle consiste à le demeurer alors que les choses vous arrivent.

 

Le téléphone sonne : ne pas être complètement perdu dans l’appel. Et voici un texto : . . . Oh, mon Dieu ! Tous ces appareils qui créent de la dépendance ! À nouveau, la dépendance est une identification complète au contenu, parce que chacun de ces signaux sonores est du contenu pour le mental. Et bien sûr, en général, les messages sont insignifiants. Examinez quelques-uns de tous ces messages écrits en une journée, des millions, et vous constaterez que les messages importants sont très rares. La plupart ne sont que du bavardage dénué de sens qui prétendent être importants puisqu’ils arrivent au moyen d’un appareil électronique qui produit un son. Alors, vous pensez : « Quelque chose d’important se passe dans ma vie. Oh, et un autre message important : je suis à l’entrée du café, et toi, où es-tu ? Quoi de neuf mec?

 

Et des emails continuent d’arriver, même la nuit : « Ça doit être important. J’interromps mon repas pour voir ce qui est arrivé. Ce sont des défis modernes et le défi consiste de nouveau à ne pas s’identifier continuellement au contenu, parce que ce ne sont là que d’autres nuages qui apparaissent dans votre mental. Vous êtes bombardés de ces choses. Il s’agit donc de rester encore présent alors que vous lisez un texto. Cela fait appel à l’intelligence d’être capables de vous reliez au contenu sans y être complètement absorbés.

 

On peut là utiliser à nouveau le mot « détachement », un espace entre le message et vous-même, indépendamment de ce qu’est le message. Vous continuez de sentir votre présence tandis que vous interagissez avec un appareil électronique ou avec une autre personne. Vous continuez de sentir votre présence essentielle. C’est la pratique spirituelle. La pratique spirituelle ne consiste pas à essayer de parvenir à un certain état, parce qu’en réalité, vous êtes déjà cet état. Il s’agit de continuer d’être cela consciemment dans la vie quotidienne et non pas seulement lorsque vous écoutez une causerie spirituelle ou lorsque vous êtes assis dans la posture du lotus pendant vos méditations.

 

Dans la vie quotidienne, c’est la pratique. Et vous la perdrez probablement de temps en temps où vous vous retrouvez à nouveau dans la réaction, absorbés par le contenu. À mesure que vous vous familiarisez avec la conscience ou la présence, vous remarquez la différence de qualité entre cet état et l’état d’identification aux gros nuages. C’est si sensible, si évident.

 

Vous pouvez aussi apprendre à observer une autre personne et remarquer si elle est absorbée dans l’identification au contenu ou s’il y a au moins encore un peu d’espace là, ce qui implique par exemple, comme je l’ai dit, une certaine émanation de bonne volonté envers vous, envers autrui – cela fait partie de cet état – une certaine vigilance. Autrement, c’est une absorption complète dans la réaction ou dans un schéma mental et une opacité, une densité en résulte alors. Et vous ne voyez plus ce qui est véritablement important. « Il faut que je pense à ça maintenant ! »… . . . Vous battez des ailes ! . . .

 

En fait, regarder le ciel peut être une aide, en particulier s’il y a un peu de bleu entre les nuages. Vous voyez qu’il y a là les nuages et là l’espace. Oh, il y a le ciel là, les nuages et le ciel ! Je n’avais pas vu. Certes, ce n’est pas le vrai ciel, mais c’est… Et invitez dans votre vie, non pas seulement quand vous êtes défiés où la pratique est bienvenue, mais aussi quand tout va bien… – Recherchez cette conscience dans votre vie quotidienne, non pas dans le sens de chercher où elle est, mais en réalisant qu’elle est le fait même de la chercher, de sorte que vous puissiez entreprendre certaines actions ou percevoir des choses sans avoir compulsivement besoin de les étiqueter mentalement.

 

Soyez la présence qui perçoit plutôt que la personne qui perçoit. Par exemple, vous pourriez regarder dans cette pièce, si vous êtes un praticien avancé de la conscience, vous pourriez regarder dans cette pièce, la saisir entièrement, sentir la présence qui rend possible la perception, sans rien nommer mentalement. Il n’y a que la conscience spacieuse, des perceptions à travers la conscience spacieuse. C’est une pratique spirituelle étonnante : des perceptions à travers la conscience spacieuse plutôt que le voile des jugements mentaux. « Bon ou mauvais », ce sont toujours des jugements mentaux. Cela en soi est une pratique.

 

Vous pouvez le faire continuellement où que vous soyez. Vous avez un moment, pourquoi ne pas pratiquer la perception à travers la conscience spacieuse. Ce pourrait être une perception auditive. La perception visuelle est bien sûr la perception principale pour la plupart des humains. Donc, vous pouvez sentir une présence ou une conscience et il y a la perception sensorielle. La conscience est la lumière, non pas la lumière visuelle, la lumière de la conscience qui rend possible la perception.

 

Sans la conscience qui perçoit cette pièce, cette pièce ne serait qu’atomes et molécules flottant dans l’espace, parce que ce n’est rien d’autre. Ce ne serait pas un théâtre merveilleux du XIXe siècle. Ce seraient des atomes et des molécules en train de flotter, mais il y a ici une lumière de… – Le monde est créé par cette perception consciente. . . . Et c’est une pratique magnifique qui vous libère aussi continuellement du fait d’être enfermés dans la petite personnalité.

 

Donc, au lieu de fonctionner continuellement en tant que petite personnalité, toujours reliée aux choses à travers les yeux de la petite personnalité conditionnée, vous percevez les choses à travers la dimension transcendante de la conscience et vous devenez la lumière du monde, ce qui est bien sûr essentiellement le sans-forme qui regarde les formes qu’il a créées lui-même. Je recommande donc vivement cette pratique de perception à travers la conscience spacieuse. Cela requiert bien sûr une certaine vigilance et cette vigilance est ce qu’elle est déjà.

 

Soit vous êtes vraiment capables de regarder dans la pièce pendant une ou deux minutes sans l’ingérence des pensées, soit vous pouvez ne regarder que trois ou quatre secondes, c’est très bien, ça n’a pas d’importance. C’est intemporel dans tous les cas. C’est la dimension intemporelle de la conscience. Donc, trois ou quatre secondes, c’est excellent, ça suffit. Et à mesure que vous pratiquez pendant des temps plus longs, vous pouvez être la conscience. Et un jour, vous pouvez entrer dans un magasin, regarder le vendeur et pendant cinq secondes, il n’y a pas la moindre pensée et vous dites ce que vous avez à dire, puis vous retournez simplement à la conscience.

 

En étant en relation avec toute personne, en rencontrant les autres, soyez la conscience plutôt que la personne. Vous êtes donc deux, pourrait-on dire, l’identité en tant que forme avec le mental qui est conditionnée par le passé et la dimension intemporelle de la conscience. Et parfois, il ne s’agit pas nécessairement d’être l’une ou l’autre bien que cela arrive aussi. La plupart des gens ne sont toujours que la personne, inconscients de la conscience. Il peut aussi arriver que vous passiez du temps dans la conscience au lieu de penser ou avec peu de pensées. Mais les deux arrivent principalement ensemble de sorte que quand vous vous mettez à penser, l’espace demeure. Même en pensant, il y a toujours le sentiment de la présence à l’arrière-plan.

 

Par exemple, je suis en train de parler ici, mais il y a une présence continue à l’arrière-plan des mots, d’où ils émanent. Il n’y a pas une planification de ce que sera la prochaine phrase. C’est magnifique de réaliser qu’on peut faire confiance en cette présence qui est en fait la véritable intelligence, non conceptuelle, inconditionnée, l’intelligence pure, et qu’on peut compter dessus au lieu d’avoir à compter exclusivement sur quelque connaissance ou quelques aptitudes qu’on a acquises dans sa vie. Et, quand il y a la conscience, même les aptitudes acquises sont amplifiées, plus créatives à travers cette présence.

 

Si vous aimez danser, la présence apportera quelque chose qui n’était pas là avant. Il en va de même pour une oeuvre d’art ou quoi que ce soit d’autre, parler, écrire, tout ce que vous faites, toute interaction avec autrui. Il y a une qualité qui s’écoule de la présence qui n’était pas là auparavant. Il y a donc également une qualité dans les interactions humaines qui n’existait pas jusque-là.

Les autres le remarquent quand vous les appréciez au-delà de la fonction qu’ils remplissent dans telle situation particulière au niveau de la forme. Vous pouvez parler affaires avec un homme d’affaires – c’est la fonction – mais s’il y a la présence, vous pouvez sentir la présence en l’autre et il y a un sentiment d’appréciation qui survient dans l’interaction. Peut-être de façon non consciente, l’autre personne peut sentir qu’elle est appréciée au-delà de la fonction qu’elle remplit. Vous n’êtes donc pas en train d’apprécier, peu importe qui, votre comptable parce que c’est un bon comptable – oui, ça peut être le cas également, mais vous pouvez sentir, par votre présence, sa propre présence essentielle.

 

Et les autres peuvent sentir que leur état d’être est apprécié et non pas seulement leur fonction. Ils aiment être reconnus dans leur état d’être essentiel. Je veux dire, ils ne pourraient pas vous l’expliquer si vous leur demandiez : « Oh, j’aime ce client. Je ne sais pas pourquoi, mais à chaque fois qu’il vient, j’aime parler avec lui ». Voilà ce qu’on pourrait vous dire. Il ne sait pas qu’il est reconnu dans son état d’être essentiel et il ne le dirait donc pas. Simplement, il se sent bien en sa présence. Donc, les autres se sentent bien en votre présence.

 

En particulier avec les enfants, c’est très important d’être présent. Ils aiment être reconnus. J’ai brièvement écrit là-dessus dans « Nouvelle Terre », je crois. Les enfants veulent être reconnus dans leur état d’être essentiel bien qu’ils n’utiliseraient évidemment pas cette expression. Ils aiment ça. Et ne soyez pas seulement en relation avec vos enfants dans la situation particulière du moment où il vous faut leur dire : « Maintenant, tu dois faire ceci ? Est-ce que tu as fait cela ? Qu’est-ce que tu fais là. Fais ça maintenant ! ». Il y a toujours autre chose à faire et il n’y a jamais une reconnaissance de l’état d’être de l’autre. Il s’agit d’accorder son attention, un moment d’espace. Vous n’avez pas besoin d’en parler. Faites-le simplement. Vous n’avez pas à dire : « Prenons un temps maintenant pour l’espace ». Ce n’est pas utile.

 

C’est donc un cadeau qui arrive à travers vous dans le monde. Les autres aiment ça. L’ego le désire : « Je veux que les autres m’aiment ». C’est précisément ce que vous obtenez quand vous n’avez pas l’ego. C’est frustrant, n’est-ce pas ? C’est seulement quand l’ego a cessé d’agir que vous obtenez ce qu’il voulait.

 

Cet enseignement a besoin d’être propagé dans le monde à travers vous qui le vivez, parce que rien d’autre ne peut transformer ce monde, si ce n’est ce changement dans la conscience humaine, ce qui passe par l’individu, à savoir vous-même. Donc, s’il n’y a pas de changement en vous, le monde ne changera pas. Le monde change avec votre état de conscience, à mesure que votre état de conscience change. L’individu commence à le remarquer en certains changements autour de lui : plus d’harmonie, plus de paix dans les interactions. Les gens sont attirés par vous, parce qu’ils aiment être avec vous. Cela pourrait même être trop, vous devez vous sauver. Mais des choses arrivent pour lesquelles vous auriez lutté auparavant. Ce n’est là que la cerise sur le gâteau car elles ne sont pas nécessaires en réalité, parce que vous avez déjà trouvé la seule chose qui soit nécessaire. C’est tout ce qui importe et le reste ne sont que des détails.



18/05/2014
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