Eckhart Tolle « La Transcendance »

Eh bien, c’est un titre étrange pour notre causerie, la transcendance : Transcender, transcendantal, la méditation… vivement recommandée par tous les dentistes. C’est toujours bon de commencer avec une plaisanterie. Transcender signifie bien sûr aller au-delà de la limitation ou des limitations, d’une frontière. Aller au-delà des frontières. Ce n’est pas s’attaquer à la frontière, c’est aller au-delà. Cela n’implique pas que vous détruisiez la frontière. Vous la traversez en quelque sorte ou vous passez par-dessus.

 

Il semble que nous soyons ici pour cela, non pas seulement ici dans cette pièce, mais ici sur cette planète sous forme humaine, pour aller au-delà des limitations, parce que tout le monde est né avec certaines limitations. Pour commencer, vous naissez avec un corps. Donc, vous êtes certainement limités par ce biais, vous vous sentez piégés : « Suis-je ce corps ou suis-je dans ce corps ? ». Le corps peut certainement être perçu comme une limitation. Vous avez ensuite votre environnement, vos parents et le milieu familial. Vous avez encore d’autres facteurs : la ville, le pays où vous vivez.

 

Pour certaines personnes, les limitations ne sont pas si terribles et pour d’autres, selon où ils se trouvent, selon les circonstances dans lesquelles ils sont nés, les limitations peuvent être très prononcées. Vous pouvez être déjà né avec un défaut physique, encore plus marqué, ou votre environnement peut être extrêmement dysfonctionnel, plus que la normale. Vous pouvez être nés dans la misère, la criminalité ou autres.

 

On pourrait dire, pour prendre une image, que c’est un peu comme si, à la naissance, on vous donnait un couteau à bois. C’est une analogie. On vous donne donc un morceau de bois. Ils semblent qu’il soit intéressant pour certaines personnes : « Oh, il a l’air pas mal, je vais pouvoir en faire quelque chose ». D’autres reçoivent un morceau de bois impossible à travailler : « Qu’est-ce que je vais faire avec ça ? C’est horrible ! Qu’est-ce que je peux faire de ça ? ».

 

Et évidemment, certaines personnes sont confrontées aux limitations et, pour le reste de leur vie, continuent d’être conditionnées et limitées par l’environnement, les circonstances dans lesquelles elles sont nées. Une personne peut donc être née dans un milieu familial dysfonctionnel, ne jamais le transcender et quand elle se marie, elle crée un milieu familial tout aussi dysfonctionnel. Les enfants de cette union feront de même à la génération suivante. Dans ce cas, personne ne transcende les limitations et c’est assez fréquent. Si vous êtes nés dans la misère, aussi selon où vous vivez géographiquement, il est évidemment très difficile de le transcender. Au fait, Nous parlons là de la transcendance sur le plan extérieur, elle a toute sa place.

 

Et d’autres sont capables de développer suffisamment d’énergie pour aller au-delà des limitations, au-delà de leur conditionnement. Il y a beaucoup d’exemples de gens qui sont devenus célèbres et ont accompli de grandes choses dans le monde alors qu’ils sont nés dans des circonstances très peu prometteuses.

 

Faire en sorte de dépasser ses limitations, de les transcender est magnifique. Cela a sa place également. Certaines personnes ont besoin de suivre des séminaires dans ce sens. Ces derniers ont aussi leur place. Si vous ne pouvez pas développer suffisamment d’énergie, il vous faut aller voir Tony Robbins, par exemple, et il se passe quelque chose : « Oui, tu peux le faire. Oui ! ». Vous pouvez alors passer à l’action et c’est très bien. Cela a à voir avec la manifestation sur le plan extérieur et cela a toute sa place. L’univers veut le faire.

 

L’une des choses que fait l’univers, c’est manifester des formes, des formes plus complexes, des formes plus belles. Les formes prolifèrent dans l’univers et nous sommes des cocréateurs. Ce n’est pas seulement Dieu qui crée des formes, des fleurs (des choses magnifiques), des montagnes, des planètes, des soleils… Vous êtes Dieu et la création se produit aussi à travers vous. Vous pouvez créer des formes. C’est le mouvement vers l’extérieur de l’univers, le mouvement extérieur dans la différenciation, avec l’augmentation de la complexité des formes.

 

À partir du big-bang, disons – s’il y a eu une telle chose – l’univers n’était pas complexe. C’était l’unique primordial devenu alors le multiple. Si vous revenez en arrière, pour le peu que nous sachions à propos de la planète, vous constatez une évolution progressive d’une complexité des formes de plus en plus grande, des formes de vie plus complexes. L’univers veut donc faire cela. Cela signifie qu’il veut le faire à travers la forme humaine. La forme humaine devient donc un cocréateur et cela a toute sa place. C’est le mouvement vers l’extérieur de l’univers dans la création des formes.

 

Quand un être humain surmonte ses limitations, les transcende, l’univers a également surmonté ces limitations à travers lui. En réalité, ce n’est pas une chose personnelle. Il n’y a finalement rien de personnel. Vous êtes l’univers, vous êtes la vie qui évolue à travers des milliards de formes. Et c’est souvent le cas quand les gens qui sont confrontés aux limitations les plus prononcées développent énormément d’énergie pour les dépasser. Cela peut être parfois de l’énergie négative, mais cela n’a pas à être ainsi. Cela peut être simplement une réponse positive.

 

Nous avons ainsi des histoires comme dans la Grèce antique, où parler en public était très valorisé en tant que forme artistique. Les micros n’existaient pas encore. Il fallait donc projeter sa voix, apprendre à le faire, parce qu’il fallait être entendu par beaucoup de gens. Je me rappelle, il y a de nombreuses années, mon premier groupe de plus de cent personnes. Ce fut la dernière fois que j’ai parlé sans micro. Il me fallait projeter ma voix : « Il n’y a que le moment présent ». Et tout le monde a dit après coup : « Ouah, c’est la conférence la plus énergique que tu aies jamais donnée ». Cela a même changé ce que je disais, parce que je devais crier.

 

Donc, dans la Grèce antique, l’un des orateurs les plus célèbres – on disait orateur, les conférenciers… Je ne me rappelle plus son nom. Il avait un défaut de langage. Il était né avec un défaut de langage. Il avait un problème au niveau de sa langue ou il ne pouvait parler que comme ça. Et il était déterminé à devenir un grand orateur. Il a passé quelques années à aller à la plage, à mettre des cailloux dans sa bouche et à se mettre à parler à la mer. Il utilisait peut-être des cailloux pour créer une difficulté supplémentaire et développer encore plus d’énergie. Il commença donc à faire des discours pour la mer, tout seul, et finalement, il est devenu le plus grand orateur de son temps en Grèce.

 

Il y a beaucoup de cas similaires à travers l’histoire concernant des gens qui ont été confrontées aux limitations les plus extrêmes et qui ont transcendé, non pas nécessairement leur limitation particulière comme dans le cas de l’orateur, mais en devenant parfois créatif ou en étant investis d’un grand pouvoir dans un autre domaine, comme Stephen Hawking, par exemple, dont le corps est complètement paralysé. Il ne peut pas parler, ni bouger, ni rien faire seul.

 

Or, ce qu’il peut faire, c’est penser. Il a apporté à la science une contribution très utile. Cependant, je ne dis pas qu’il s’agit d’éveil. Nous n’en sommes pas encore là. Pour l’instant, nous parlons de la transcendance des conditions temporelles de la forme. Il a donc été capable d’être un penseur productif, parce qu’il n’a pas résisté intérieurement, ne s’est pas plaint intérieurement de la limitation critique de sa forme physique. Je l’ai mentionné brièvement, peut-être dans Nouvelle Terre, parce que je le voyais tous les jours, il y a de très nombreuses années, à l’université où nous étions l’un et l’autre. Je le voyais tous les jours déjeuner à quelques tables de moi, nourri par ses étudiants. À l’époque, il était seulement connu dans son domaine et dans la ville ; il n’était pas encore célèbre.

 

J’ai pu voir le sort terrible qu’était le fait d’être complètement paralysé sans plus être capable de communiquer. À l’époque, l’appareil qu’il utilise aujourd’hui pour communiquer n’avait pas encore été inventé. Il utilise une synthèse vocale. Donc, il ne pouvait rien faire d’autres que de produire des sons de gorge. Des personnes qui avaient été avec lui suffisamment longtemps pouvaient interpréter ses sons de gorge. . . Elles étaient à son service en tant qu’interprète. Par miracle, elles pouvaient vous répéter ce qu’il disait. . . . « Encore un morceau de tarte aux pommes, s’il vous plaît.

 

Maintenant, il a une synthèse vocale. Il appuie sur un ou deux boutons. Je ne sais pas comment ça marche. Je suppose qu’il peut encore bouger un ou deux doigts et l’on entend la synthèse vocale : « Tarte aux pommes, s’il vous plaît ! ». Cela aurait été beaucoup plus facile pour lui quand cela lui est arrivé. La maladie s’est abattue sur lui quand il a été diplômé. En Angleterre, c’est appelé une infirmité moteur-cérébrale. Je crois qu’on l’appelle autrement ici.

 

Il aurait pu se révolter, se lamenter sur son sort, se décourager, se résigner, être aigri, s’apitoyer sur lui-même, se dire : « Qu’est-ce que je peux faire maintenant ? Je ne peux même plus communiquer. Le corps va lâcher ». Il y a de nombreuses années, ils avaient annoncé sa mort comme imminente. Et il n’a pas réagi ainsi. Et quand j’ai vu cela… Je l’ai une fois regardé de très près. Il arrivait et j’ai ouvert la porte pour son fauteuil roulant. Je l’ai regardé dans les yeux et j’ai vu qu’il n’y avait aucune résistance intérieure, ni chagrin en lui. Il y avait juste . . . juste ça. Son invalidité physique n’est pas devenue une partie de sa personnalité. La personnalité ne s’est pas identifiée à la maladie et ne l’a pas incluse à son sentiment de soi.

 

Si la personnalité avait inclus la condition physique à son sentiment de soi, elle serait devenue très lourde. La lourdeur de la souffrance aurait été en elle. Et si vous portez la lourdeur de la souffrance dans votre personnalité, sinon impossible, il est très difficile de contribuer à quoi que ce soit de bénéfique pour autrui, parce que vous êtes surchargés d’un soi très lourd et ce soi très lourd empêchera tout afflux de la dimension créatrice en vous. Il ne le permettra pas. Vous ne pouvez donc pas être créatifs quand vous êtes surchargés de cette lourdeur de l’entité en souffrance.

 

Donc, ce que j’ai vu quand je l’ai regardé dans les yeux, c’est qu’il n’y avait pas d’entité souffrante. Il y avait un corps souffrant, oui. Il devait y avoir l’infirmité physique, l’inconfort, la perte de la dignité où tout devait être fait pour lui. Il ne peut pas aller aux toilettes, manger seul… Tout cela aurait pu être quelque chose d’horrible s’il y avait eu une identification du soi à la condition physique, mais il n’y avait pas d’identification du soi à la condition physique, il n’y avait que la condition. Il était donc capable d’accomplir son travail, de contribuer plus que d’autres. Il avait évidemment plus de temps. Il ne pouvait rien faire d’autre. Or, s’il s’était plaint, il aurait pu faire bien d’autres choses, parce qu’il aurait été coincé dans sa tête, ne faisant que tourner en rond, que se plaindre de son sort malheureux.

 

Donc, c’est la transcendance. J’ai observé cela, la façon dont la transcendance peut agir et pourquoi elle se produit. La transcendance des conditions ne se produit pas quand vous vous en plaigniez. Bon, elle peut se produire : disons que vous êtes en colère du fait d’être pauvre et vous transcendez alors votre pauvreté en montant une entreprise à partir de votre colère. Vous travaillez jour et nuit. Et vous pouvez y arriver ! En dépit de tous les obstacles, vous finissez par avoir une affaire, mais la limitation que vous rencontrez est tout aussi grosse que celle que vous avez laissée derrière vous, parce que vous êtes piégés dans ce lourd sentiment de soi, la personnalité conditionnée par la colère dont on pourrait quasiment dire que c’est une limitation encore plus grave que la pauvreté.

 

Donc, la transcendance des conditions et la transcendance des limitations ne s’accomplissent pas en se rebellant contre les limitations, parce que si vous le faites, vous vous retrouvez très rapidement dans une situation similaire ou d’une autre sorte qui est peut-être pire que celle que vous avez quittée. Vous pouvez aussi travailler si dur pour montrer désespérément au monde que vous êtes quelqu’un que votre corps subit le stress et quand vous parvenez enfin à atteindre votre statut de milliardaire, votre coeur est à bout, la circulation, toutes les fonctions de votre corps … Votre corps est en ruine.

 

Vous avez transcendé une limitation pour tomber dans une autre. Or, il est possible, si c’est fait dans la non-résistance, d’une façon positive, de transcender les limitations et des gens l’ont fait. Stephen Hawking est juste un exemple. Il y en a beaucoup. Il y a probablement des livres sur la façon dont certains ont transcendé leur limitation. Je ne sais pas s’il y en a. S’il n’y en a pas, peut-être que l’un d’entre vous pourrait en écrire un. Vous pouvez parfois le voir dans des films, des films basés sur la vie de certaines personnes, sur la manière dont elles ont surmonté tous les obstacles pour réussir enfin… OK !

 

Et évidemment, une fois que vous avez réussi, vous réalisez que ce fut effectivement un parcours magnifique : « J’ai dépassé tout ça et j’en suis là ». Et vous constatez : « Oui, bien sûr, là où j’en suis maintenant, il y a encore une nouvelle série de limitations. C’est une bonne chose que j’aie dépassé tout cela, je m’en réjouis. C’est bien que j’aie transcendé tout cela ! ». Mais vous n’êtes pas libres, vous n’êtes pas libres. Si vous êtes partis de la pauvreté pour bâtir un empire commercial, vous n’êtes certainement pas libres.

 

Nous avons donc la transcendance au niveau matériel, elle a sa place, et c’est une chose merveilleuse, mais elle vous laisse toujours avec une autre série de limitations qui sont en fait extérieures, mais ultimement, les limitations auxquelles vous n’échappez pas sont intérieures. Nous en arrivons maintenant à une autre sorte de transcendance que vous pourriez appeler la transcendance spirituelle, comme vous voulez, où vous transcendez l’identification à la forme et c’est là bien sûr la vraie transcendance.

 

Vous transcendez l’identification à la forme extérieure, aux choses, à vos possessions dans le monde, aux relations, à ce que les gens pensent à votre sujet, mais en fin de compte, ce que cela veut dire… – Parce que toutes ces choses que je viens de mentionner, les choses ou les possessions, le statut social, toute votre situation existentielle, etc., vous en faites l’expérience à travers votre mental. C’est une forme faite de pensées. Ce sont des pensées dans votre tête.

 

Donc, si vous vous identifiez… Disons que vous vous identifiez avec votre voiture. S’identifier veut dire qu’elle rehausse votre sentiment de soi. Ce n’est pas que vous appréciez simplement une voiture confortable, ce qui est parfait, mais y a-t-il un lien entre votre sentiment de soi et la voiture ? C’est ce qui se passe dans beaucoup de cas.

 

Donc, vous avez transcendé la pauvreté. Vous avez enfin la Bentley. Maintenant, quelle est la nouvelle limitation ? Vous avez transcendez cela et la nouvelle limitation est l’identification du soi avec cette forme extérieure. Prenons juste la voiture pour représenter pratiquement n’importe quoi d’autre avec quoi vous pouvez vous identifier. Utilisons la voiture. Cela pourrait être la maison, une grosse structure que vous avez créée ou tout autre chose.

 

Donc, vous vous identifiez avec la voiture. Autrement dit, d’une façon subtile, elle rehausse votre sentiment de qui vous êtes. Maintenant, cela demande évidemment que vous soyez vus avec la voiture. Pour rehausser ce sentiment, il faut que les autres vous voient. Vous êtes ainsi regardés avec envie par les autres automobilistes et l’ego s’en nourrit. Une belle femme ou un bel homme dans une autre voiture vous regarde et regarde votre voiture. Subitement, les deux fusionnent et ne font plus qu’un. Elle vous aime et elle aime votre voiture. Vous sentez cela, l’ego s’en nourrit. Vous vous sentez valorisés, comme l’est votre sentiment de soi, de qui vous êtes.

 

Donc, si vous viviez tout seul sur une île déserte, très rapidement, cette voiture ne pourrait plus servir de valorisation du sentiment du soi puisqu’il n’y aurait plus personne pour la regarder à part vous. Il vous faudrait alors recréer des histoires dans votre tête, imaginer des gens qui la regardent, mais ça ne marche pas très bien.

 

Maintenant, ce avec quoi vous vous identifiez en réalité, si vous considérez la racine de l’identification, ce n’est pas vraiment la voiture, mais c’est l’idée ou le concept de la voiture dans votre tête. Finalement, l’identification ne se fait pas avec l’objet extérieur. L’identification se fait avec l’image, avec l’idée dans votre tête, le concept dans votre tête qui dit « c’est à moi ». Cette idée « mon objet, ma voiture » est une forme-pensée. Donc, ce avec quoi vous vous identifiez, si vous y regardez de très près, ce n’est pas la voiture. C’est la forme-pensée « ma voiture ».

 

Donc, en fait, ce dans quoi vous êtes piégés n’est pas la forme extérieure. La forme extérieure est parfaite. Une belle voiture, c’est une belle chose. Si c’est une belle voiture, confortable, n’importe quoi d’autre, rapide, vous pouvez… Bon, n’allons pas là ! C’est très bien. Ce n’est donc pas la chose extérieure. Donc, toute identification du soi avec quelque chose a lieu en réalité au niveau de la pensée. C’est au niveau du mental. C’est donc là où vous êtes pris au piège. Vous n’êtes pas réellement piégés dans la voiture. Vous pouvez conduire une Rolls-Royce et être complètement libres.

 

La question est de savoir s’il y a identification à une pensée, une forme-pensée en tant que « moi », s’il y a un sentiment de soi dans la pensée. C’est là où vous êtes pris au piège, là où presque tout le monde continue d’être pris au piège, ce qui est l’identification du soi avec la pensée. C’est la racine de toute identification à la forme.

 

Il semble qu’il y ait beaucoup de gens qui s’identifient à toutes sortes de formes autour d’eux : leurs vêtements, ce qu’ils portent ; on a déjà parlé de la voiture. L’identification du soi culmine bien sûr pour beaucoup de gens avec la façon dont ils s’habillent. Ici, évidemment, les gens ont déjà transcendé ça. Et là encore, il ne s’agit pas de se dire : « Maintenant, je ne dois plus porter que des choses bon marché, parce qu’il faut que je montre que je ne m’identifie pas avec… ».

 

Non, parce que c’est encore une identification. Vous mettez quelque chose qui a l’air bon marché ; vous vous percevez vous-mêmes comme étant si spirituels que vous ne portez plus de choses à la mode bien que vous pourriez vous les offrir. Vous ne les portez plus, parce que maintenant, vous êtes spirituels. Là encore, vous êtes piégés, dans une forme-pensée en tant que moi, la personne spirituelle qui n’achète plus et qui n’a plus besoin de choses à la mode. Vous avez une nouvelle forme-pensée du moi qui est tout aussi forte que celle qui s’identifiait avec les vêtements à la mode.

 

Vous êtes donc identifiés à cela. Et, d’une façon subtile, vous pouvez vous sentir supérieurs, quand vous allez au centre commercial, à tous ces gens toujours identifiés avec ces vêtements branchés. À nouveau, vous êtes piégés, sans le savoir, piégés dans une nouvelle forme-pensée : « c’est moi ». Il y a donc toutes sortes de choses, les vêtements ; vous pouvez évidemment être identifiés au corps physique.

 

Maintenant, pour beaucoup de gens, le corps physique représente une source d’orgueil, si vous êtes assez jeunes. Il peut être une source d’orgueil, votre apparence. Il peut être fort, beau, plus beau que d’autres ou musclé. À Santa-Monica, il y a Muscle Beach, la plage des bodybuilders. Vous pouvez y allez. Si vous n’avez pas de muscles, n’y allez pas, parce que votre ego souffrirait.

 

L’identification au corps physique : là encore, ce n’est finalement pas l’identification au corps physique, mais à la forme-pensée relative au corps physique. Maintenant, comme vous pouvez le savoir, pour beaucoup de gens, le corps physique est utilisé comme identification négative. Ils n’en sont pas contents. Et c’est pourquoi on vend tant de magazines, pour les gens qui ne sont pas contents de leur corps et ces magazines vous disent, soit comment être content de votre corps, soit les changements à apporter de sorte que vous en soyez finalement contents ou que vous l’acceptiez tel qu’il est. Mais encore que ce ne soit pas tout à fait ça, ce n’est pas l’identification à la pensée « mon corps ».

 

Parmi les autres choses avec lesquelles vous vous identifiez évidemment, c’est là où vous habitez. C’est une extension de vous-mêmes. Cela ne veut toujours pas dire que vous ne pouvez pas habiter dans une belle maison. La question est : y a-t-il une forme pensée concernant ma maison avec laquelle je m’identifie ? C’est le piège. Et pour être libre, c’est ce qui doit être transcendé. Vous n’avez pas besoin de transcender la voiture matérielle.

 

Une fois que vous avez transcendé la forme-pensée, vous êtes complètement libres de dire « j’ai toujours envie de cette voiture » ou « Non, je n’en ai plus envie ». « J’ai toujours envie d’être dans cette maison » ou « Non, je n’ai plus besoin d’une maison aussi grande ». L’un ou l’autre, ça n’a aucune importance. L’emprisonnement est en vous et la liberté est en vous. Donc, l’identification du soi avec le penser est l’emprisonnement primordial et c’est ce que vous devez transcender pour être véritablement libres ou, pour le dire autrement, pour vous éveiller en tant qu’être humain.

 

Pour s’éveiller. Maintenant, qu’est-ce que cela veut dire quand on dit que vous vous éveillez ? De quoi est-ce que vous vous éveillez ? Vous vous éveillez de l’identification à la forme. Tant que vous êtes identifiés à la forme… – Et finalement, toutes les formes se réduisent à une forme-pensée. C’est de cette façon que vous éprouvez toute chose. C’est une forme mentale dans votre tête. Vous ne savez même pas s’il y a une voiture là dehors. Personne ne sait. Vous pourriez être en train de rêver, rêver de la voiture. Personne ne sait si…

 

Des philosophes en parlent depuis des milliers d’années. Comment savons-nous que les choses que nous percevons sont effectivement là ? Tout ce que nous savons, c’est ce qui nous est transmis dans le mental à travers les organes des sens. Les signaux qui passent par les organes des sens y sont alors décodés d’une manière ou d’une autre et à partir de là émerge un monde. Mais nous ne savons pas en réalité ce qui se trouve là dehors et nous pouvons très bien dire : « Il se pourrait que ce soit une sorte de rêve que nous faisons.

 

Il y a beaucoup de chose qui justifient cette hypothèse qu’il s’agit d’une sorte de rêve. Qu’est-ce qui caractérise un rêve ? Eh bien, il arrive pendant un moment et il disparaît. Eh bien, c’est la même chose que la vie, non ? Tout arrive pour un certain temps et vous constatez ensuite que cela se dissout, que c’est passé. Peut-être que cela dure juste un peu plus longtemps que le rêve nocturne. C’est passé : votre enfance, les vacances de l’année dernière, le repas d’hier soir… Qu’est-ce que c’était ? C’est déjà passé. Tout fuit comme les rêves.

 

C’est peut-être la raison pour laquelle le public a largement répondu à un film comme Matrix, parce qu’il contient l’idée principale sous-jacente que nous rêvons tous et que très profondément, tout le monde reconnaît là une vérité essentielle. Eh bien, si c’est le cas, nous pouvons au moins être dans un rêve plus agréable. Si nous savons que nous rêvons, le rêve sera plus agréable, parce qu’il y aura une autre dimension dans le rêve et c’est le fait de savoir.

 

Dès lors, vous n’êtes plus complètement dépendants des formes qui apparaissent tout le temps dans le rêve et qui doivent vous apporter votre sentiment de soi, ni ne percevez les formes qui surgissent continuellement dans le rêve comme une menace pour votre sentiment de soi. Il y a ces deux mouvements. Cela veut donc dire transcender les formes, transcender l’identification avec le mental et aux formes continuellement créées par le mental.

 

Quand cela est transcendé… La transcendance n’est pas quelque chose qui est fait une fois pour toutes. Vous ne pouvez pas dire : « Ca y est, maintenant, je l’ai fait ! ». La transcendance doit être quelque chose de continu. Quand vous êtes éveillés, ce qui veut dire ne plus être identifié à la forme, la dimension de la transcendance est là en vous tout le temps. Or, qu’est-ce que cette dimension de la transcendance ? C’est un espace à l’arrière-plan de votre vie dans lequel vous ne pensez pas. En ce moment même, tandis que je parle, je peux sentir l’espace – j’essaie de le montrer visuellement, ici quelque part ou ici – où il y a un silence. Les mots arrivent et puis ploc ! Le silence. Ce n’est pas difficile. Oui, cela requiert une certaine vigilance. Si vous êtes à moitié endormis, c’est perdu. C’est obscurcit.

 

Vous commencez alors à vous déplacer dans ce monde en ne surimposant plus continuellement des structures mentales à tout ce que vous percevez. C’est la façon dont la dimension de la transcendance se manifeste dans votre vie. Une autre façon de le dire, vous ne jugez plus continuellement toute situation, tout événement, toute personne qui se présente dans votre vie. À propos, votre vie veut dire le moment présent. C’est votre vie.

 

Donc, vous ne jugez pas continuellement, n’essayez pas de définir toute chose qui survient dans votre vie, à savoir maintenant, dans le moment présent, et vous lui faites de la place pour être. Et tout à coup, le changement se produit. À partir de la personne que vous êtes, vous devenez… – la personne est un ensemble de formes avec lesquelles la conscience s’est identifiée. À partir de là, vous devenez la conscience qui n’a pas de forme et vous jouez avec le monde de la forme, lequel est le rêve. Vous lui permettez d’être, vous y participez même, mais il y a toujours un espace en vous de sorte que votre attention ne soit pas tout le temps complètement absorbée par le rêve. Le rêve est là, c’est magnifique, mais il ne consomme pas toute votre conscience.

 

Il y a donc un espace libre en vous. Ce que nous faisons ici, ce qu’est le processus, nous… extirpons… – Quel drôle de mot ! extirper ? Non, extirper n’est peut-être pas un mot qui existe. Extirper ? OK, il dit qu’il existe. Nous extirpons la conscience de son identification à la forme. Nous la retirons et il n’y a plus que la conscience pure, sans forme. Nous la retirons donc de nos pensées en ne nous identifiant pas avec les pensées. Il y a une pensée. La pensée veut engloutir toute votre conscience. Toute forme-pensée est gourmande. Toute forme-pensée veut proliférer. Elle veut aboutir à d’autres pensées associées et elle veut toute votre attention. Cette attraction existe depuis des milliers d’années. Chaque forme-pensée vous dit : « C’est vraiment très important, il faut que tu y réfléchisses ! ».

 

Et la plupart des gens suivent chaque pensée qui surgit. Elle les attire comme le fait une chose très tentante : « Viens par ici », dit la pensée, « je vais t’emmener où tu dois aller ». OK ! Et vous y voici, en pleine nuit, pendant deux ou trois heures. Et vous faites cela, vous la suivez là où elle veut que vous alliez pendant des années. Évidemment, vous n’allez nulle part. Elle veut seulement toute votre attention. Toute chose en tant que forme veut demeurer dans cette forme. Une impulsion l’anime.

 

Et une fois que vous le savez, vous pouvez vous dire : « OK, je ne vais pas là ». Vous en sortez alors et avant même de vous en rendre compte, la pensée qui était si importante – et qui ne l’était évidemment pas – se dissout. Vous ne l’avez plus nourri de votre attention qui est alors disponible pour vous comme lumière, peut-on dire, comme état de vie, comme la conscience, à savoir le pouvoir, le pouvoir pur. Avant, elle était malencontreusement employée par le penser inutile et vous lancez une mission de sauvetage, si l’on peut dire. On peut dire que la conscience a été kidnappée par la pensée et elle doit être secourue. Vous vous dites : « Je la sors de là ».

 

Et vous avez alors la conscience disponible pour créer à partir de tout cela un rêve magnifique, parce qu’il y a là la créativité maintenant. C’est alors la conscience inconditionnée qui est la source de toute créativité, de tout ce qui est nouveau, vivant et magnifique. Vous pouvez créer, vous pouvez utiliser ce pouvoir ou, pour mieux dire, il vous utilise alors pour s’exprimer lui-même :, « Ah ! », sans identification. Vous pouvez créer des formes sans identification aux formes.

 

Et, bien sûr, une façon de faire cela, c’est quand vous êtes actifs, quand vous travaillez… Je n’aime pas ce mot. « Travailler » est un mot qui devrait peu à peu devenir obsolète, parce que, d’une certaine manière, « travailler » suggère que vous n’aimez pas ce que vous faites. Il y a un proverbe qui dit – je ne sais pas d’où il vient – : « Apprécie ce que tu fais et tu n’auras plus jamais à travailler ».

 

Appréciez ce que vous faites… Maintenant, le piège ici… Quand vous êtes actifs, un autre attachement… C’est très facile de retirer la conscience du penser quand nous sommes assis ici, mais quand vous vous activez, quand vous vous mettez à faire dans le monde, vous pouvez rapidement retomber dans l’identification avec les pensées et quand vous faites des choses, quand vous êtes actifs, le danger est de vous attacher au résultat que vous voulez obtenir par ce que vous faites. Le résultat final que vous devez obtenir est plus important que ce que vous faites dans l’instant, ce qui est là encore, parce que le résultat final est une forme-pensée… Vous n’êtes attachés à rien d’extérieur, vous êtes attachés à la forme-pensée du résultat, du résultat final.

 

Il y a donc un nouveau piège. Ainsi, quand vous êtes actifs, un degré élevé de vigilance est requis de sorte que vous restiez centrés sur le moment présent et que vous donniez à ce que vous faites plus d’attention qu’à ce que vous voulez obtenir. Vous savez ce que vous voulez obtenir. C’est là, mais si vous n’appréciez pas ce que vous faites dans l’instant, à quoi bon ? La grosse erreur est de se dire : « Quand j’aurai atteint mon but, je serai content ». Non, vous ne le serez pas. Il vous faut être déjà content maintenant et vous serez content quand vous atteindrez votre but.

 

C’est un ancien enseignement, Le non-attachement au fruit de l’action, un ancien enseignement indien qui provient de la Bhagavad Gita. En Inde, c’est appelé le karma yoga. C’est une pratique spirituelle qui consiste à demeurer conscient dans l’action, dans le faire. Le non-attachement aux résultats. Est-ce difficile ? Non, tout ce que cela demande, c’est apprécier ce que vous faites et veillez à ce que le faire soit désormais primordial. Le but est secondaire. Vous pouvez avoir un but, lequel est évidemment une forme-pensée, mais il est secondaire.

 

C’est donc l’éveil. Vous vous éveillez de l’identification à la forme, de l’identification de soi à la forme, à savoir tout le sentiment de soi qui était une illusion, parce qu’il s’identifiait à la forme basée sur le penser, sur les pensées. Un assemblage de pensées constituait un sentiment de soi, un ensemble de pensées sans cohésion. Certaines vont et viennent, mais ça reste un paquet de pensées : « Moi, c’est ça ! Moi et ma vie, c’est ceci, c’est cela. J’ai tels souvenirs, j’ai ces possessions-là, ces choses, ceci, cela ». C’était le soi. Et si ce sentiment limité de soi basé sur l’identification à la forme n’est pas transcendé, la vie n’est que frustration. Vous passez simplement d’une frustration à une autre.

 

Finalement, pour l’exprimer d’une autre façon, on peut dire qu’il vous faut vous transcender vous-mêmes. C’est là encore un enseignement très ancien. Il y a 2600 ans, le Bouddha en parlait, parce que le soi que vous pensez être, disait le Bouddha… – Bon, ça n’est pas dans les sutras, mais mon intuition me dit que c’est plus ou moins ce que disait le Bouddha. Le soi que vous pensez être est une illusion. Vous êtes identifiés à la forme. Vous n’êtes pas la forme. Et tant que vous êtes identifiés à la forme, aux formes-pensées, vous souffrez. C’est ce qu’il a dit.

 

Et il n’a pas dit en réalité… Certains croient qu’il a dit que toute vie était souffrance. Non, il a dit : « Toute identification à la forme est souffrance », parce que toute identification à la forme crée un faux soi. Et tant que vous vivez dans un faux sentiment de soi, vous souffrez. La peur n’est jamais loin ou en dessous, si vous regardez bien, il y a de la peur quelque part quand vous êtes identifiés à la forme, parce que tout le monde sait que les formes sont fragiles et tout le monde sait que les formes sont fugaces. Même si vous ne le savez pas consciemment, vous le sentez. Tout le monde peut sentir la fugacité des formes.

 

Tous les jours, il peut se passer quelque chose avec ma voiture. Elle est garée là-bas, qui sait si elle y sera encore quand je la chercherai ? Et bien sûr, si elle n’est plus là, si l’on s’est identifié à elle, la forme-pensée « ma voiture » créera de la souffrance, parce que l’afflux sensoriel ne correspond plus et la pensée est sous le choc : « Ho, ma voiture ! ». Grosse contrariété !

 

Maintenant, il est facile de se tromper soi-même en se disant « je ne suis pas attaché ». Vous l’ignorez parfois jusqu’à ce que, finalement, vous alliez un jour là où vous avez garé votre voiture qui n’est plus là. Vous savez alors si vous étiez attachés ou non. Ce peut être votre position sociale que vous perdez subitement. Disons que vous êtes un V.I. P. et que les journaux déclarent tout à coup que vous avez tout gâché. Or, vous étiez attachés à votre position, aux opinions des autres à votre sujet, qui là encore sont des formes-pensées dans votre tête, parce que c’est là où vous les connaissez. Les opinions des autres sont leurs formes-pensées dont vous vous emparez et qui deviennent vos formes-pensées avec lesquelles vous vous identifiez étant donné qu’elles vous procurent de la confiance en soi.

 

Notre pratique consiste donc à se désidentifier d’avec la pensée, de retirer la conscience des pensées. C’est simple. C’est simple. Il y a alors un changement radical en vous, un changement radical. Je dis « simple », parce que la pensée est complexe et quand vous considérez tous les problèmes du monde à partir de la pensée, vous avez envie de vous suicidez, à cause de toute leur complexité, parce qu’il y a tant de problèmes : « Oh, mon Dieu ! ». Même votre propre vie, vos propres problèmes peuvent suffire pour cela : « Oh, non ! ». C’est tellement complexe !

 

Donc, quand je dis que c’est simple, je veux dire que ce nouvel état de non-identification est un état de grand pouvoir et de simplicité. Vous devenez plus simples, mais également investis de plus de pouvoir. D’un certain point de vue, vous pouvez dire qu’il est difficile de passer de l’ancien état de conscience, du faux soi, au nouvel état de conscience éveillée, appelé le non-soi par les bouddhistes, alors que les enseignements indiens l’appellent le Soi, le grand Soi, lequel est opposé au petit soi. Et évidemment, les gens ne l’ont pas réalisé à l’intérieur. Ils croient qu’il y a un conflit énorme entre le Bouddha, les bouddhistes qui disent qu’il n’y a pas de soi et les enseignements hindous qui parlent de l’Atman, le Soi ultime.

 

Les gens qui commencent à étudier les Écritures pensent qu’il y a là un gros conflit : « Vous dites qu’il n’y a pas de soi et nous disons qu’il y a un soi ». Ce ne sont que des concepts. Ce sont de petits indicateurs qui parlent exactement de la même chose, mais vous ne le savez pas jusqu’à ce que vous vous en rendiez compte à l’intérieur. Bien sûr que c’est la même chose. L’Atman n’a pas de forme. C’est le sans-forme. Oubliez donc le non-soi et le soi, dites simplement le sans-forme. Là, on y est !

 

Et ce qui est étonnant, c’est que la compréhension de cette vérité est exprimée depuis des milliers d’années. Il y a comme un petit fil qui passe entre quelques personnes ici ou là qui ont compris cette vérité qui traverse l’histoire, le courant sous-jacent de l’histoire et non pas sa folie. Il y a un fil. C’est appelé parfois la philosophie éternelle. C’est la vérité intemporelle de l’existence humaine qui a déjà été exprimée, mais très peu de gens ont été capables de la comprendre.

 

Beaucoup de gens qui ont approchés ces enseignements, mais qui étaient incapables de les comprendre, ne les considéraient qu’à travers le mental et les prenaient à contresens.

 

Exactement le même enseignement faisait partie de leur faux sentiment de soi. C’est assez fréquent dans la religion. Toute religion vise à la transcendance, mais ce qui s’est passé, dans la plupart des cas, c’est que la religion a fait partie du faux sentiment de soi, l’opposé de la transcendance. C’est à la fois drôle et triste. C’est probablement mieux de le voir comme drôle.

 

Quand vous voyez le dilemme humain, l’inconscience humaine, quand vous voyez ces schémas fondamentaux ou en fait ce schéma fondamental particulier d’illusion, quand vous le voyez et le reconnaissez, peut-être chez les autres au début – vous pouvez le voir à l’oeuvre chez les autres – et finalement en vous-mêmes, si vous riez alors – parfois, vous ne pouvez pas vous en empêcher, en particulier si vous le voyez chez vous – vous pouvez vous mettre à en rire et c’est libérateur. C’est également un moment de transcendance.

 

Et vous voyez alors et vous vous dites : « Tout mon drame des vingt, trente dernières années a été fabriqué par mon mental à partir de rien, pour rien ! ». Vous vous êtes plaints des situations, des gens ; vous avez éprouvez ceci, cela, avec tel ou tel sentiment de soi… tout cela basé sur une illusion fondamentale : « c’est une illusion fondamentale qui a créé tout le drame de mon existence pour une souffrance horrible… Ouh ! Je ne peux plus le supporter, je ne peux plus le supporter ! ».

 

C’est alors une chose magnifique quand, de cette façon, le cauchemar de votre vie se transforme en rêve très agréable, parce que la façon dont vous expérimentez la vie change avec la venue de la dimension transcendante. Elle change la façon dont vous expérimentez la vie, parce qu’alors, vous n’expérimentez plus la vie à travers le filtre d’un faux soi. Le faux soi déforme tout ce que vous vivez. Le faux soi veut le conflit. Le faux soi veut le malheur. Il ne le sait pas, mais pourquoi est-ce qu’il le veut ? Parce que cela le renforce. Vous pouvez le voir en observant les gens dans la vie quotidienne, voir comment ils font. Ils veulent le malheur, parce qu’il leur donne un sentiment plus fort de qui ils sont.

 

Cela peut commencer avec une chose toute simple comme se plaindre des situations, des autres ou de leur propre vie. C’est une déformation complète. Vous regardez à travers le faux sentiment de soi où toute petite plainte se renforce. Quand vous vous plaignez de quelque chose, cela veut dire que c’est perçu comme insuffisant. Cela pourrait être l’endroit où vous vous trouvez – « Regarde ça, c’est horrible ! » – ou une personne que vous venez de rencontrer, vous vous plaignez à son propos.

 

Quoi que ce soit, quelque chose est considéré comme insatisfaisant, ce qui veut dire que vous vous placez dans une position supérieure à la situation. Vous en êtes le juge. Vous êtes le juge de cette situation, de cet endroit ou de cette personne. Vous la jugez comme laissant à désirer, autrement dit comme révélant un manque. En fait, vous devenez donc supérieur à quiconque dont vous vous plaignez ou critiquez. Cela rehausse le faux sentiment de soi.

 

Et vous pouvez parfois l’observer chez des gens qui n’ont rien d’autre à quoi s’identifier, ils se déplacent dans la rue en criant de colère des injures ou des remarques à tous les passants : « Toi… ». Leur faux sentiment de soi se renforce en accusant tout le monde d’être mauvais, méchant ou je ne sais quoi : « Ouah, ça devient de plus en plus fort. Je dois faire ça, parce que je n’ai rien d’autre à quoi m’identifier. J’ai besoin de ces formes-pensées ». Ça peut être très fort.

 

Ce que nous avons besoin d’apprendre, c’est retirer l’attention du penser. C’est la transcendance. Vous transcendez les formes primordiales que sont les pensées. Ensuite, vous avez dans votre vie la forme et l’espace, dans votre vie quotidienne. Il n’y a pas que des formes, une pensée après l’autre, une réaction après l’autre, une chose après l’autre qui arrive. . . Des formes. Si vous ne faites rien, il faut que vous pensiez à ceci. . . Vous ne faites que poursuivre des formes. En fait, les formes vous poursuivent tandis que vous poursuivez des formes. . . Et vous laissez tomber, vous dormez un certain temps, vous vous réveillez et vous avez une minute avant de vous rappeler. . . . Comme le chien à la poursuite du lapin. . .

 

C’est une chose terrible, il n’y a que des formes dans ma vie, juste des choses auxquelles je dois penser, que je dois faire, dont je dois m’inquiéter, auxquelles je dois réagir : des formes, des formes, des formes. Pas d’espace. Et maintenant, il commence à y avoir également de l’espace dans votre vie et cela change tout. Donc, tandis que les formes se produisent, le besoin compulsif de surimposer des interprétations à ce qui se passe se dissipe et vous permettez d’être à ce qui est, aux gens, aux situations, aux endroits qu’avant, vous auriez critiqués ou dont vous vous seriez plaints. C’est comme c’est. C’est évidemment comme c’est. Ces choses sont-elles des problèmes ? Non, si vous lâchez la critique et la plainte, elles ne sont pas un problème.

 

Pouvez-vous toujours passer à l’action si les choses doivent être changées. Une action est très souvent nécessaire et c’est parfait, sans aucune plainte. Vous agissez sans vous plaindre et c’est pour une action différente. Une énergie différente s’écoule dans ce que vous faites. Vous avancez donc dans la vie en tant qu’être spacieux et non pas en tant que personnalité lourdement chargée. Rien d’autre n’est spirituel, si vous voulez utiliser le terme « spirituel ». La spiritualité n’a rien à voir avec le genre de pensées qui vous traversent la tête.

 

Vous pouvez penser aux anges et à Dieu 24 heures par jour, ce n’est pas spirituel. Être spirituel, c’est ne pas s’identifier aux pensées. Quand il y a de l’espace en vous, c’est la dimension spirituelle. Et c’est la libération, c’est la transcendance de votre mental. Vous pouvez dire « la transcendance du monde » ; vous pouvez dire « la transcendance du temps », parce que l’espace en vous est la dimension intemporelle.

 

Et c’est ce que Jésus disait quand il déclarait : « J’ai vaincu le monde ». Autrement, cela n’aurait évidemment pas de sens. Qu’aurait-il vaincu ? Il n’était pas une personne puissante du monde. Il n’avait rien vaincu dans ce monde. « J’ai vaincu le monde », disait-il. Il y a des choses dans le Nouveau-testament que je sens avoir été littéralement dites par Jésus tandis que beaucoup d’autres ont été un peu déformées, certaines complètement déformées et d’autres encore qu’il n’a pas dites du tout. « J’ai vaincu le monde » : oui, c’est cela. Il disait : « J’ai transcendé le monde, je l’ai transcendé ». À la base de tous les enseignements, c’est ce dont il s’agit.

 

Jésus disait aussi : « Nie-toi toi-même ». Qu’est-ce que cela veut dire, « nie-toi toi-même » ? « Nie » veut dire « reconnais que le soi est faux, qu’il n’est pas réel. De ce fait, vous le niez. Vous ne pouvez pas nier quelque chose qui est réel. S’il a une réalité, comment pourriez-vous le nier ? Or, vous niez ce que vous reconnaissez avoir une nature illusoire. Vous niez l’irréalité. Il y a donc là un enseignement profond. Maintenant, dans les églises, quand vous dit-on ce qu’il signifie vraiment ? Jésus parlait bien sûr des enseignants religieux de son temps quand il disait : « Ils se sont emparés des clés du royaume des cieux, y sont entrés et ont empêché les autres d’y entrer ». Ce sont des paroles intemporelles.

 

Notre pratique est donc l’abandon du penser compulsif, lequel est le jugement. Maintenant, si ceci ne se produisait pas actuellement dans le champ d’énergie collectif de la planète, Nous ne serions pas assis ici, nous ne serions pas ici. Nous sommes ici, parce que cela arrive dans le champ d’énergie collectif.

 

Les gens posent très souvent cette question : est-ce que cela nous arrive simplement ou nous faut-il le faire arriver ? Pouvons-nous rester en retrait pour lui permettre d’arriver ? Ni l’une, ni l’autre réponse n’est tout à fait satisfaisante quand je dis que nous devons le faire arriver ou que nous devons nous retirer pour lui permettre d’arriver. Chacune est insuffisante. Il vous faut combiner les deux, parce qu’il n’y a rien en vous qui ne fasse pas partie du tout.

 

Quoi qu’il se passe en vous, cela fait partie du mouvement de la totalité et une partie de ce que veut le tout est que vous sentiez que vous pouvez le faire arriver. C’est la façon dont le tout oeuvre à travers vous. C’est donc bien de sentir : « Je peux choisir de sortir du penser ». Vous ne pouvez que le choisir, évidemment, parce que le tout le fait à travers vous, mais quand le tout le fait à travers vous, l’unique, la conscience une le fait à travers vous. C’est comme si vous pouviez le faire et c’est très bien.

 

Je choisis de sortir du mental. Maintenant, comment est-ce que je peux le faire ? C’est parce que la conscience s’éveille ici. Ce n’est pas le petit moi qui provoque le changement de conscience, simplement, j’en fais partie ; je suis une expression de ce changement. Vous l’êtes. Quand je dis « je », je veux dire ce « je », ce « je », ce « je ».

 

Donc, les enseignants qui vous disent qu’il n’y a rien que vous puissiez faire et de ne même pas vouloir changer votre état de conscience, mais de juste faire ce que vous faites, N’ont pas tout à fait raison. Et les autres qui vous disent « il faut vraiment que vous travailliez dur pour y arriver » n’ont pas raison non plus. Permettez-le dans votre vie. Soyez ouverts. Coopérez avec l’élan d’évolution de l’univers. Voilà ce que vous pouvez faire. Cessez de dresser des obstacles à l’élan universel d’évolution. Vivez en étant intérieurement alignés sur le moment présent. N’opposez pas un non au moment présent. Dites oui au moment présent. Et sortez des pensées autant que vous le pouvez dans la vie quotidienne.

 

Or, cela vous demande d’avoir ici un aperçu du fait d’être conscient sans pensées, tout de suite, juste dans l’instant. . . Vous n’avez pas à penser tout le temps, c’est une illusion. C’est tellement beaucoup plus beau de juste être assis ici, vous ne perdez rien du tout en étant ici simplement en tant que champ de conscience ! Et amenez cela dans les interactions humaines. Quand vous regardez un autre être humain, pourquoi avez-vous besoin de le juger.

 

Vous pouvez apprendre cela du chien. Le chien vous regarde, il ne vous juge pas, parce que le chien est au stade pré-mental. C’est pourquoi c’est si merveilleux de regarder un chien, vous regardez le non-jugement. Maintenant, nous ne retournons pas à cet état. Nous accédons à l’état post-mental, là où nous rencontrons également le chien dans le non-jugement. Le chien est dans le pré-mental, nous accédons au post-mental. Mais tout à coup, nous rencontrons la beauté manifestée par le chien. Oui, nous sommes l’un et l’autre dans le non-jugement.

 

Peut-être avez-vous entendu le dicton, la petite prière : « Mon Dieu, aidez-moi à devenir la personne que mon chien pense que je suis ». Maintenant, il y a bien sûr une petite erreur ici : le chien ne pense pas. Or, le chien a de l’amour. Puisque le chien n’est pas bloqué par le penser, il y a en lui une ouverture à la joie et à l’amour. Le chien vous regarde et il remue la queue : . . . Le chien ne pense pas, ne vous critique pas. Il est sans jugement, simplement avec un courant d’énergie.

 

Et c’est donc là où nous en venons maintenant en dépassant le besoin de penser. Nous pouvons toujours penser magnifiquement quand il le faut, mais au-delà du besoin de penser, nous voici dans le même état, mais il est encore plus profond que l’état du chien, parce qu’il y a là une profonde connaissance. Cela pourrait être la raison pour laquelle l’humanité a dû passer par l’état égoïque. C’est ce qu’il semble. Autrement, pourquoi cela serait-il arrivé ? Il semble que certaines personnes pensent que ce fut une grosse erreur. Je ne crois pas à une telle chose, à une erreur. Cela devait se produire.

 

Comment est-ce que je le sais ? Eh bien, je le sais simplement par moi-même : j’ai dû notamment passer par l’illusion de l’ego et souffrir profondément. Et par la souffrance créée par le faux sentiment de soi, par la souffrance devenue insupportable, la libération s’est produite, l’éveil, tel le bouton d’une fleur qui tout à coup . . . Donc, ce qui se passe habituellement… Vous pouvez observer toute l’histoire de l’humanité en vous-mêmes. Vous pouvez même observer toute l’histoire de l’univers en vous-mêmes : ce qui est en bas est comme ce qui est en haut.

 

De temps en temps, observez la compulsion en vous : il y a toujours une petite entité, le faux soi qui veut revenir qui n’est rien d’autre qu’un paquet de pensées. Elle veut revenir. Elle veut utiliser Internet pour se développer. . . . et se plaindre . . . s’adonner aux plaintes, aux commérages, aux mensonges. Elle aime les mensonges. Elle ne fait pas la différence entre mensonge et vérité. Si un mensonge sert mon but de valoriser mon sentiment de soi, tout mensonge fera l’affaire. . . Et la technologie amplifie le phénomène. Je l’envoie à cinq mille personnes. Et certaines de ces cinq mille personnes liront le message et y croiront. Il pénètre alors leur mental. Ils embarquent . . .

 

Ici, nous tentons d’utiliser le même média en faveur de la santé mentale.

 

Au fait, nul besoin de penser entre les tintements de la cloche, tout comme en écoutant le son, vous n’avez pas besoin d’y penser !



19/05/2014
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi